
Homélie du 2e dimanche de Pâques, 27 avril 2025
Par l’abbé Gaël de Breuvand
Il s’agit de la transcription d’une prédication orale. Les titres sont ajoutés après transcription.
I – Rencontrer Jésus, fondement de la joie
Le texte d’évangile que nous venons d’entendre commence le jour de Pâques. Reprenons un peu la chronologie de ce jour. Nous sommes le premier jour de la semaine. Nous sommes un dimanche après le grand repos du Sabbat. Il est 6 heures du matin, le jour commence à peine à poindre et les femmes s’en vont au tombeau. Elles découvrent un tombeau vide. Elles voient des anges qui leur disent : « Il n’est pas ici, Il est ressuscité ». Elles s’en vont prévenir les disciples. Pierre et Jean accourent. Ils viennent au tombeau. Ils voient le tombeau vide et c’est tout. Ils repartent pensifs. Marie-Madeleine est restée au tombeau. Et elle voit, elle rencontre Jésus. « Rabouni ! » Maître… Elle le reconnaît. Mais quand elle témoigne, elle fait face à une forme d’incrédulité. Un peu plus tard, il est peut-être trois[1] heures de l’après-midi, les disciples d’Emmaüs sont en train de rentrer chez eux. Ils quittent Jérusalem et s’en vont à Emmaüs et là, sur le chemin, ils rencontrent Jésus. Ils commencent par ne pas le reconnaître et il faut que Jésus les enseigne et se fasse reconnaître par eux à la fraction du pain. C’est vers 18h que Jésus apparaît au milieu des 11, qui ne sont que 10. Il en manque un. « La paix soit avec vous ! ». Dans quel état sont ces disciples ? Eh bien les dix disciples qui sont là, et le onzième qui est Thomas et qui est sorti… Ils sont quand même très dubitatifs quant à tout ce qu’ils ont entendus depuis le matin. « Ces propos leurs semblèrent délirants »… C’est ainsi qu’ils reçoivent les propos des femmes. Oui, il n’est pas si évident de croire à la résurrection. Evidemment, quand les disciples ont vu Jésus, ils l’ont entendu, vus et touchés même. Ils l’ont reconnu et « ils sont remplis de joie en voyant le Seigneur ». Oui, être dans une relation intime, de rencontre personnelle avec le Christ, cela donne la joie. C’est un bon indice, d’ailleurs, si vous avez des apparitions, si vous en sortez troublés… ce n’est pas sûr qu’il s’agisse de Jésus.
II – Thomas le courageux : la Foi un don de Dieu
Nous avons dans cet évangile l’histoire de Thomas, qui n’était pas avec eux. C’est étonnant. Le cardinal Barbarin aimait dire que Thomas montrait là son courage. « Thomas le courageux ». Pourquoi ? Parce qu’ils sont enfermés dans cette salle par crainte des Juifs et donc celui qui n’est pas enfermé est celui qui a moins peur que les autres. Il n’était donc pas là au moment où Jésus est apparu aux autres. Heureusement qu’il est là. Sinon, on pourrait croire que c’est facile de croire. Non. « Nous avons vu le seigneur ». Hop, hop, hop… « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous ; si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas ! ». Et ce qui est impressionnant, c’est que Thomas reste avec les dix. Il pourrait se dire qu’ils sont fous en vérité. Ils disent avoir vu Jésus : ce n’est pas possible. Quand on est mort, on est mort ! Et pourtant, Thomas reste avec eux. Il y a une forme de solidarité, de charité fraternelle. « Ils sont un peu timbrés mes amis, mais je reste avec eux ! » En fait, dans cet évangile, il y a le fondement même de la raison pour laquelle nous nous réunissons le dimanche : Jésus a inventé le premier rassemblement dominical. Il est avec ses disciples le premier dimanche de la résurrection ; le dimanche suivant, Il est encore avec eux ! Et 2000 ans plus tard, nous sommes toujours réunis le dimanche pour rencontrer Jésus. Jésus arrive donc au milieu des disciples. Il redonne ce cadeau, ce don. « Je vous donne la paix ». Il dit à Thomas : « Avance ton doigt ici ». Et ce qui est étonnant, c’est que Thomas, visiblement, n’approche pas son doigt des mains. Il n’approche pas sa main du côté. Non. Il reconnaît Jésus. Ce n’est pas une démarche d’abord intellectuelle ou scientifique. Non. Il a rencontré Jésus. Et là, il peut tomber à genoux et s’écrier : « Mon Seigneur et mon Dieu ». Cette phrase est par exemple une pierre d’achoppement pour les témoins de Jéhovah. Ils sont très proches de nous mais ils ne croient pas que Jésus est Dieu. Du coup, ils ont beaucoup de mal avec cette phrase. « Mon Seigneur et mon Dieu ». Thomas a reconnu en Jésus ce messie annoncé, Dieu lui-même. Ce n’est donc pas d’abord une démarche intellectuelle ou scientifique, ça compte car notre intelligence est faite pour fonctionner et la foi s’appuie sur notre intelligence -, mais il s’agit de faire un saut dans la confiance. Oui. Jésus, je crois Ta parole. Je crois que Tu m’aimes. Je crois que Tu es là. En fait, Thomas est un peu notre modèle à tous qui n’avons pas rencontré Jésus. Il a du mal à croire. Peut-être que parmi nous, beaucoup n’ont pas de mal à croire. Tant mieux. Rendons grâce à Dieu pour cela. Quand la foi est pour nous comme une évidence, c’est un cadeau de Dieu. Parmi nous, il y en a pour qui c’est pas évident, plus compliqué et pour ceux qui sont dehors, encore plus. Et là, il y a une demande à formuler au Seigneur. « Seigneur, donne-moi de te rencontrer ». C’est le Christ lui-même qui va nous faire don de cette confiance, de cette foi.
III – L’Église, relais de la miséricorde
Enfin, dernier point, nous sommes le dimanche de la Miséricorde. Nous le sommes parce que le pape Jean-Paul II s’est mis à l’école de sainte Faustine qui a eu des apparitions du Christ miséricordieux et qui a demandé que ce dimanche après Pâques soit consacré à la divine miséricorde. Cela n’est pas un hasard si le Christ a choisi cette date-là. C’est en rapport avec cet évangile-là. Parce que dans cet évangile, il y a cette foi manifestée par Thomas, mais il y a aussi cette parole de Jésus : « Recevez l’Esprit saint. A qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis. A qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus ». De quoi parle-t-on ? On parle d’abord du baptême. C’est le Christ qui donne la foi ; c’est le Christ qui sauve. Mais c’est l’Eglise qui a reçu le cadeau de la miséricorde de Dieu pour la transmettre aux hommes. Le week-end dernier, nous avons eu la joie de baptiser Lény, Luc, Maël et Lucile. Nous les avons plongés dans la miséricorde de Dieu. Et c’est l’Eglise qui a reçu la mission de faire ce travail de plongeon de la vie de l’humanité tout entière dans la miséricorde de Dieu. Par le baptême mais pas seulement. La mise en place du sacrement de réconciliation est comme une reviviscence du baptême. L’Église a la mission de porter la miséricorde au monde. L’Église pour laquelle on pense d’abord au sacrement du baptême et de la réconciliation, ne se résume pas à cela. Cette mission, le Christ nous l’avait déjà donnée. C’est cette prière du Notre-père que nous prions à chaque messe. « Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés ». Notre mission de chrétien, c’est de pardonner. Autrement dit, donner la miséricorde à tous ceux qui en ont besoin. Et tout le monde en a besoin. Nous sommes missionnés pour cela. Finalement, ce que Thomas a vu, c’est Dieu incarné. C’est Dieu miséricorde. C’est l’amour de Dieu qui se rend disponible pour nous. Et nous, ce cadeau-là, il nous faut le recevoir pour le donner aux autres. C’est bien ce qui va se passer dans l’eucharistie dans quelques instants. Recevoir Jésus pour le porter au monde.
C’est un des derniers textes de notre pape François, l’encyclique sur le sacré cœur, Dilexit Nos, ‘Il nous a aimés’. Je vous en recommande la lecture. C’est peut-être le texte le plus important de son pontificat et pourtant, il y en a des choses importantes qui ont été dites et écrites par notre pape. Dilexit Nos, Il nous a aimés… C’est la raison même de notre foi. C’est parce qu’Il nous aime que nous pouvons croire. C’est parce qu’Il nous aime que nous pouvons nous laisser sauver. C’est parce qu’il nous aime que nous avons une bonne nouvelle à annoncer au monde : Dieu nous aime.
[1] A l’oral les horaires ont été adapté pour que cela colle avec la messe de 11h00 !