
Homélie du 5e dimanche de Carême, à l’occasion du 3e scrutin,
le 6 avril 2025, par l’abbé Gaël de Breuvand.
I – Dieu nous veut vivant
Voilà un long texte pour un grand événement… un texte a été tout particulièrement lu aujourd’hui parce que Lény, devant au premier rang – qui est catéchumène, qui va recevoir le baptême pendant la nuit de Pâques – va vivre aujourd’hui le troisième scrutin. Après le premier scrutin, avec le récit de la Samaritaine et la question de l’eau vive, le don de l’Esprit Saint pour purifier le cœur ; après l’évangile la semaine dernière de l’aveugle-né où Jésus rend la vue, donne la lumière à l’homme, aujourd’hui, nous voyons que Jésus est capable de rendre la vie. Et pour Lény, comme pour chacun de nous qui avons été baptisés, c’est l’annonce de la vie nouvelle en Dieu. Le Christ est mort et ressuscité pour que nous aussi nous mourrions et nous ressuscitions. Nous sommes faits pour la vie éternelle !
Je vais revenir sur quelques petits points de ce texte… D’abord, Jésus est volontairement ambigu. Il nous dit que Lazare n’est pas vraiment mort, il est endormi, et puis Il affirme « Si, il est mort ». Parce qu’en réalité, Jésus joue sur les mots. Lorsque l’on parle de mort en langage biblique, en langage chrétien, on ne parle pas forcement de la mort physique… Parce que qu’est-ce que c’est qu’être vivant ? Être vivant, c’est d’abord une question de relation : Le microbe est un tout petit vivant et il est donc capable d’une toute petite relation. La plante est capable d’une relation un peu plus grande, l’animal un peu plus encore et l’homme est capable de la relation parfaite : aimer et se laisser aimer. Finalement pour un homme, être vivant, c’est aimer. Si un homme n’aime pas, c’est comme s’il était mort. Jésus vient ainsi nous rappeler que la mort physique n’est pas la fin de l’histoire. Il nous annonce aussi, en filigrane, qu’il y a une autre mort plus grave que la mort physique.
II – La Foi de Marthe, la non-foi de Marie
Jésus vient donc voir Ses amies Marthe et Marie qui viennent de perdre leur frère et on voit cette première rencontre. C’est Marthe qui vient : « Si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort. » On sent le cri de douleur et de détresse et, en même temps, cette confiance en la puissance de Jésus. C’est une confiance qui s’étend encore maintenant « Mais maintenant encore, je le sais, tout ce que Tu demanderas à Dieu, Dieu Te l’accordera ». Il y a un acte de foi posé par Marthe. Elle croit en la puissance de Jésus, elle croit qu’Il est le Fils de Dieu, elle l’affirme : « Oui je crois qu’il ressuscitera à la résurrection au dernier jour parce que Tu es le Fils de Dieu. » On entend cette foi de Marthe qui pourtant n’a pas encore saisi à quel point Jésus est puissant, à quel point Il est le Fils de Dieu car elle renvoie la résurrection au Dernier Jour. Elle n’envisage même pas que Jésus puisse ressusciter Lazare aujourd’hui.
Et puis, il y a Marie, qui est très proche de Jésus, on l’a déjà rencontrée dans les évangiles. Marie n’est pas venue à la rencontre de Jésus, on peut penser qu’elle est enfermée dans sa douleur… Quand Marthe vient la chercher pour lui dire que ‘le maître l’appelle’, elle se dérange mais elle n’y était pas allée avant. Elle aussi commence en disant « Si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort. » Il n’y a pas de parole supplémentaire et on voit Jésus saisi d’émotion, Il est bouleversé. Alors comme les Juifs qui étaient présents, on peut se dire qu’Il est bouleversé parce que Lazare est mort… Mais, en réalité, quand on lit bien les événements, Il est bouleversé parce que la phrase de Marie « Si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort » est un reproche et n’est pas un acte de foi. Marie a refusé d’aller aussi loin que Marthe. Ici, Marie a choisi de se laisser mourir : elle refuse la relation. Pour Jésus, c’est bien plus grave que la mort de Lazare.
Et on entend les réactions : « Lui qui avait ouvert les yeux de l’aveugle, ne pouvait-il pas empêcher Lazare de mourir ? » Oui, Il pouvait, c’est ce qu’Il nous avait dit tout au début du texte : « Cette maladie sera pour la gloire de Dieu. »
Jésus veut montrer quelque chose de nouveau. Jésus est capable d’être triste, de pleurer. Sans aucun doute, la mort de Lazare Le touche, mais Il est encore plus frappé par la non-relation qu’il y a avec Marie en ce moment.
III – Jésus choisit de se faire aider !
Alors Jésus arrive devant le tombeau, Il va accomplir ce signe, ce miracle. Oui, Jésus est plus fort que la mort. Il peut ordonner à un mort de se lever et sortir de son tombeau. Là encore on peut suivre une comparaison, si la mort c’est comme être coupé de la relation, on le voit bien quand Jésus le relève, Lazare est encore ligoté, il a besoin d’aide pour qu’on lui délie les mains et les pieds. C’est une chose extrêmement importante quand nous voulons ‘être vivants’, aimer et nous laisser aimer, parfois c’est un peu dur parce que les épreuves de la vie nous tombent la tête, et c’est trop compliqué… nous avons besoin d’aide. Ceux qui nous entourent, des êtres humains ont été envoyés par Jésus pour être des relais de Sa tendresse et de Sa puissance. Il s’agit dans nos vies d’accueillir les envoyés de Dieu et de Sa puissance ! Et nous aussi nous devons être des envoyés de Dieu pour ceux qui nous entourent et nous recevons cette mission de délier les pieds et les mains de ceux qui sont autour de nous.
Voici donc quelques réflexions sur cet évangile de la résurrection de Lazare. Si Lazare est ressuscité, en réalité, il va lui arriver quelque chose de terrible, c’est qu’il va devoir re-mourir. Il a été relevé des morts, oui, mais c’est pour reprendre une vie terrestre habituelle.
C’est la grande différence avec ce qu’annonce cette résurrection : Jésus, Lui, va mourir sur la Croix et va ressusciter. Et lorsque Lui ressuscite, Il est vivant pour toujours ! Aujourd’hui, le Seigneur vient habiter au milieu de nous, aujourd’hui le Seigneur frappe à la porte de notre cœur en nous demandant de Lui laisser une place. Aujourd’hui, Il veut nous donner la vie. Alors tournons nos cœurs vers Lui, ouvrons-Lui la porte, laissons-Le nous faire vivre : aimer et nous laisser aimer.