Dimanche de la Parole ! Le corps de Dieu

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Ne 8, 2-4a.5-6.8-10 ; Ps 18 (19), 8, 9, 10, 15 ; 1 Co 12, 12-30 ; Lc 1, 1-4 ; 4, 14-21

Homélie du 3e dimanche de TO, année C,
26 janvier 2025
par l’abbé Gaël de Breuvand avec les couples qui se préparent au mariage,
C’est la transcription d’une prédication orale, les titres sont ajoutés ensuite.

I-                  Les écritures, le corps de Dieu

Aujourd’hui, les paroles de Dieu qui nous sont données sont un peu longues, mais pas trop difficiles. Tout d’abord, nous avons le livre de Néhémie : nous sommes en 450-500 avant J.-C. Il y a eu la grande épreuve, le peuple a été vaincu, envoyé en exil, le temple a été détruit, ils sont restés 70 ans en exil, et la Providence a permis qu’ils reviennent chez eux. Ils ont mis du temps pour reconstruire le temple, cela a été difficile. Il a fallu 20 ans et, au bout de ces 20 ans, l’enthousiasme est un peu retombé : on a beau avoir un temple en état de marche, tout ne va pas bien. Finalement, l’espérance est un peu éteinte.

C’est là qu’Esdras réunit le peuple entier et veut leur faire écouter la Parole de Dieu. Cette Parole, c’est la Torah pour les Juifs, c’est l’ensemble des livres de la Genèse, de l’Exode, du Lévitique, des Nombres et du Deutéronome ; ces cinq premiers livres de la Bible ont une place toute particulière pour les Juifs. Ils se réunissent à 6h du matin jusqu’à midi. Ils écoutent pendant 6h d’affilée (!) la Parole de Dieu qui est proclamée en hébreu, que la majorité des gens ne comprennent plus, et qui est traduite et expliquée par les prêtres, qui prêchent finalement. [donc, tant que je ne dépasse pas 6h, j’ai le droit !!!…] En tous les cas, cette parole de Dieu qui est donnée, c’est l’occasion de se replonger en Dieu Lui-même. Et c’est un grand moment de joie, « ce jour est consacré au Seigneur votre Dieu, soyez dans la joie, ne pleurez pas, mangez des viandes savoureuses, buvez des boissons aromatisées », aujourd’hui les enfants ont droit à du coca ! C’est le don de la Parole de Dieu !

Ce que vient nous dire ce texte, c’est que Dieu – vous savez, Celui que l’on ne voit pas, que l’on n’entend pas, que l’on ne touche pas, Celui qui est au-delà de tout ce qu’on peut imaginer, Celui qui est infini, qui n’a jamais commencé et qui ne finira jamais, Celui qui est Dieu, qui est totalement inaccessible – Dieu a choisi de se rendre accessible dans Sa Parole. Le grand saint Jérôme – qui est le grand traducteur de la Bible – nous dit finalement que la Parole de Dieu, c’est comme le Corps de Dieu. Parce que rencontrer quelqu’un, cela passe par son corps. Je n’ai jamais encore rencontré aucun d’entre vous par une connexion d’esprit à esprit ; je pense que cela ne peut pas arriver… En revanche, pour vous rencontrer, je passe par mon corps, j’ai besoin d’avoir des yeux, des oreilles et une bouche, et je passe par votre propre corps, parce que vous êtes quelque chose que je perçois, que je sens, que je touche. La Parole de Dieu joue ce rôle dans notre relation à Dieu : nous avons besoin de la Parole de Dieu pour rencontrer Dieu. C’est un besoin essentiel, sinon, si c’est simplement une question au fond de mon cœur, une relation toute individuelle et personnelle – qu’il ne faut pas exclure – je vais m’inventer mon propre dieu : il n’y a rien d’objectif.

II-                Le Christ, Dieu incarné

Dans la Première Lecture, nous avions la plus longue homélie du monde – 6h ce n’est pas mal ! – et puis on a entendu cet évangile. Saint Luc, dans son introduction, nous dit qu’il y a des témoins qui ont raconté ce qu’ils avaient vu et entendu de Jésus : ‘moi j’ai décidé de m’informer, de mener l’enquête’ – « moi », c’est Luc, n’est pas un témoin oculaire, il n’a pas connu Jésus de son vivant – ‘je suis allé interroger tout le monde et j’ai organisé un texte complet, qui nous dit tout ce qu’il faut savoir sur Jésus’. Et nous voyons Jésus qu’il présente, Il vient dans sa synagogue natale, à Lui, à Nazareth, et ouvre un passage qui dit « L’esprit du Seigneur est sur Moi car le Seigneur M’a consacré par l’onction. » Il dit essentiellement – c’est un prophète qui parle – Je suis ici pour vous donner la parole de Dieu. Il lit ce passage, et n’importe qui d’autre aurait fait une longue explication sur qui est ce Messie que l’on attend. Vous avez entendu la plus courte homélie du monde : « Aujourd’hui, s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre. » Jésus dit : c’est Moi. C’est Moi, le Messie, le Christ, moi qui viens vous porter la Parole de Dieu, et plus encore, ce qui est un peu en sous-texte ici et qui est plus clair ensuite, c’est Moi la Parole de Dieu.

Jésus, Dieu, Dieu tout entier, a choisi de Se rendre visible, touchable, Lui, l’Infini, a choisi de Se manifester, de Se dévoiler à nous dans un corps fini, que l’on peut délimiter. Lui, l’Éternel, qui n’a jamais commencé et ne terminera jamais, a choisi de naître et de mourir. En fait, Dieu l’inaccessible s’est rendu encore plus accessible en Jésus.

III-             « dans le cœur de l’Eglise, je serai l’amour »

Et puis nous avons entendu dans cette Deuxième Lecture, ce long texte – nous avions la possibilité de lire la version courte, mais ça aurait été dommage – une longue comparaison de saint Paul, qui n’invente rien et s’appuie sur un poète grec du VIe siècle avant J.-C., qui s’appelle Ésope – il a écrit des fables, La Fontaine l’a beaucoup copié – il avait écrit une fable qui s’appelle « L’estomac et les pieds ». Dans cette fable, tous les membres du corps se rendent compte que la main travaille car elle coupe le bois, parce qu’elle cueille des fruits, etc., que les pieds travaillent car il faut aller aux champs et il faut en revenir, que le dos travaille car il faut porter le sac, etc. Tous les membres du corps travaillent, mais il y en a un qui ne fait rien, c’est le ventre. Vraiment, il ne fait rien. Alors tous les membres du corps se mettent d’accord pour être en grève en se disant qu’ils ne travailleront plus pour l’estomac ! Nous ne ramasserons plus de fruits pour les donner à la bouche qui les donnera à l’estomac, nous n’irons plus aux champs, etc. Évidemment, au bout de trois jours, plus personne ne va bien. Et donc la fable d’Ésope est là pour nous signifier que les apparences sont trompeuses : ce qui semble le moins utile est peut-être le plus nécessaire !

Donc saint Paul nous redonne cette comparaison avec l’Église : nous sommes un corps, chacun de nous a sa place, pas un ne peut dire : ‘je n’ai pas besoin de toi’, ou il n’y en a pas qui peut dire : ‘on n’a pas besoin de moi’. De même, dans notre communauté, dans notre paroisse, il n’y en a pas un qui peut dire : ‘c’est bon, les autres feront le boulot à ma place’. Ce n’est pas vrai, chacun de nous est nécessaire. S’il y en a qui ont le don de la parole, qu’ils parlent, certains ont le don du gouvernement, qu’ils gouvernent, d’autres ont le don du service, qu’ils rendent service, ceux qui ont le don du sourire, qu’ils sourient, mais chacun de nous est nécessaire, indispensable. Parfois, il faut réfléchir : quelle est ma place ? Ce n’est pas forcément si facile à trouver mais il y en a une.

Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, une sainte qui est morte à 27 ans, se disait moi, j’ai envie d’occuper toutes les places, je veux être à la fois le pied, le cœur, je veux être tout ! Et comme elle n’arrivait pas à être tout, elle s’est dit qu’elle allait prendre la meilleure la place : je vais être l’amour, « dans le cœur de l’église, Je serai l’amour ». Et si elle est l’amour, elle est rentrée au couvent, à l’âge de quinze ans, elle n’est jamais sortie de son couvent, jusqu’à sa mort à l’âge de 27 ans. Jamais elle n’est jamais de son couvent, et pourtant elle est devenue la sainte patronne des missions, elle est la protectrice toute particulière des catholiques qui sont envoyés à l’autre côté du monde. Étonnant… Elle n’est pas partie en mission parce qu’elle a voulu porter l’amour là où elle était, et que c’est la seule chose qui compte.

IV-            L’Église, corps du Christ présent au monde actuel

Nous disions que Dieu a choisi de Se dévoiler à travers Sa Parole, c’est comme Son Corps : Dieu a décidé de Se dévoiler à travers Jésus, Son Fils, qui est finalement le Corps de Dieu. Dieu a choisi de Se dévoiler à notre monde par Son Corps, qui est l’Église, nous ! Nous sommes le corps du Christ, nous sommes l’Église. Le Christ est monté au ciel, Il nous a donné une mission : continuez ce que j’ai fait. J’ai donné ma vie pour ce monde, pour la joie du monde. Eh bien, aimez le monde ; mais aimer le monde signifie aimer celui qui est là, près de moi, mon mari, mon fiancé, ma femme, ma fiancée, mon enfant, mon parent, ma belle-mère, mon voisin, lui, là, très concrètement.

Nous entendions tout à l’heure un beau témoignage de Sophie et Cédric. Cédric a été victime d’un accident de vélo, il a été renversé par une voiture et est très handicapé ; ils témoignent tous les deux de la façon dont ils sont sortis de cette épreuve, qui continue encore ; et une question était de connaître le rapport qu’ils avaient avec le chauffard. Et tout simplement : il n’y a pas de haine, parce qu’on n’a pas le temps pour cela ! On peut ne pas forcément aimer son voisin en étant collé-serré contre lui – peut-être qu’il ne vaut mieux pas d’ailleurs – mais nous pouvons au moins ne pas le haïr, et vouloir, pour lui, fondamentalement, le meilleur. Nous sommes le Corps du Christ, nous sommes appelés à continuer l’appel du Christ pour notre monde. J’étais à Paray-le-Monial, hier, avec des enfants qui préparent la première communion ; il y avait également leurs parents. Nous avons souligné une chose : Jésus nous montre à quel point Dieu nous aime, d’un amour inconditionnel, absolu, d’un amour sans condition. Il nous aime, et il y a tant de monde qui ne le sait pas.

C’est nous, humblement, petitement, qui sommes chargés d’aimer au nom du Christ, nous sommes chargés de dire au nom du Christ : Dieu vous aime, vous êtes aimés, vous êtes extraordinaires, vous êtes des merveilles, Dieu vous a créés, Dieu vous aime et Il veut votre plus grande joie et votre plus grand bonheur ! C’est notre appel, c’est notre mission, c’est cela le cœur de la Parole de Dieu.