Homélie du Christ-roi, année B
dimanche 24 novembre 2024.
Par l’abbé Gaël de Breuvand, en présence des couples se préparant au mariage
I- Un texte pour encourager
Il y a quelques instants je disais, à vous qui vous préparez au mariage, que la Parole de Dieu, parfois, on n’y comprend rien ! Aujourd’hui ne fait pas exception, ce ne sont pas des textes faciles. Ce que je vous propose, pour méditer ce mystère du Christ-Roi – parce que c’en est un ! – c’est que nous reprenions les textes que nous avons entendus.
La Première Lecture est un extrait du Livre de Daniel. C’est un texte qui date des années 180 avant J.-C. et que se passe-t-il à cette époque ? Les Juifs subissent une forte persécution de la part d’un roi grec, et c’est extrêmement violent. Le peuple Juif se sent abandonné de Dieu. Alors Daniel prend sa plume, et écrit ce qu’on appelle une apocalypse, autrement dit, non pas l‘annonce des catastrophes qui vont venir, non, mais un texte d’encouragement, pour survivre aux catastrophes d’aujourd’hui. Ce que nous dit Daniel, c’est que dans les épreuves, dans les combats, dans les souffrances ou les difficultés, Dieu est là, Il pense à nous, Il ne nous abandonne pas.
Et Daniel a eu une vision, il nous la présente : il a vu un Fils d’homme, autrement dit un homme, comme nous, qui se trouve devant le siège de Dieu et qui a reçu domination, gloire et royauté. Sa royauté est une royauté éternelle. Du coup, que veut nous dire Daniel ? Il nous annonce qu’un jour, tout sera dans l’ordre. Aujourd’hui, c’est le désordre qui domine, mais un jour viendra où tout sera dans l’ordre. Parce que ce Fils d’homme est une annonce du Messie : un grand Roi, un grand Prophète, un grand Prêtre, qui viendra remettre les choses à plat ; Il les remettra dans un ordre qui nous donnera la paix, la joie, le bonheur.
II- Un jour nous Le rencontrerons
La Deuxième Lecture, c’était un texte du Livre de l’Apocalypse. Que se passe-t-il ? Nous sommes dans les années 90 après J.-C. La communauté chrétienne est persécutée. L’empereur Domitien trouve que le dieu des chrétiens fait concurrence au culte impérial, et les dieux n’aiment pas avoir de concurrent. Les chrétiens subissent des persécutions, et saint Jean prend sa plume. « Apocalypse » veut dire « dévoilement », « révélation ». [C’est le nom du livre en anglais : le livre des Révélations]. Dévoilement. Et il nous présente Jésus Lui-même, et Le présente à tous, au cas où nous ne l’ayons pas compris : le Roi qu’on attendait, celui qui était annoncé par Daniel, c’est Jésus. Lui, premier-né d’entre les morts – Il est ressuscité ! – prince des rois de la Terre, Lui qui nous aime : c’est ça, la parole la plus importante : Il nous aime. Il veut notre joie et notre bonheur. Il travaille pour cela, Il nous a tout donné pour cela, Il s’est donné tout entier ; et Jésus Lui-même prend la parole, dans cette vision de saint Jean « Amen, Je suis l’Alpha et l’Omega. » Alpha, c’est la lettre A en grec ; et Omega c’est la dernière lettre. Je suis le A et le Z, Je suis celui de qui tout vient : si nous existons sur la terre, c’est parce que Jésus – Parole de Dieu – a dit « que l’homme soit, faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance » ; et Il est l’Omega, dernière lettre de l’alphabet grec, parce que c’est Lui qui nous amène à notre but, à notre finalité, et que notre but, c’est la joie. Viendra un jour où nous Le verrons face à face, et ce sera le plus beau, le plus grand jour de notre vie.
III – Jésus, un roi différent
On a bien compris : le Messie, Jésus-lui-même, nous est présenté par Daniel, comme par Jean, comme le grand Roi, Celui qui aura la domination, Celui qui remettra toutes les choses dans l’ordre.
Jésus est venu… et pourtant nous n’avons pas l’impression que tout est en ordre… Et là, la clé est là dans l’Évangile ; parce que, Jésus, qu’a-t-il fait ? Il a commencé par prêcher, par parler, Il a annoncé que le royaume de Dieu était au milieu de nous. Le royaume de Dieu est Lui-même, Il EST le Royaume de Dieu. C’est lorsque nous sommes en relation avec Lui que le royaume de Dieu commence à se déployer. Et lorsque l’on dit qu’il y a un royaume, cela implique qu’il y ait un roi. Et lorsqu’il y a un roi et un royaume, il faut qu’il y ait des lois. Jésus nous en a donné, des lois, qui sont pour notre bonheur et notre joie. Parfois, nous nous plaignons en disant « ah les choses ne sont pas dans l’ordre ». Mais on a bien raison, les choses ne sont pas dans l’ordre, entre les guerres, les haines, les persécutions, les violences, etc. Que se passe-t-il ? Est-ce que nous respectons la loi qui nous a été donnée par le Christ ? Il faut la reprendre, ouvrir l’Évangile. Quels sont Ses commandements ? Il y en a un paquet… Mais il y en a trois qui dépassent tous les autres. Je vous les donne, du plus naturel au moins naturel.
Le plus naturel est le plus grand commandement : « Écoute, Israël, le Seigneur ton Dieu est Un, tu L‘aimeras de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit, de toute ta force, et tu aimeras ton prochain comme toi-même. » Je vous disais que c’était le plus naturel, et en même temps, aimer mon prochain comme moi-même, celui qui est juste là, celui qui est proche de moi, pas seulement celui que j’apprécie, non, mon prochain, mon voisin, n’importe qui dans cette église, et je dois l’aimer comme moi-même ? Cela demande déjà un petit effort ! « Aimez Dieu de tout son esprit, de toute sa force ? » Dieu n’est pas très palpable, vous l’avez remarqué ? Là aussi, il y a un acte à poser, une décision, un choix… C’était le premier commandement, aimer le Seigneur, aimer son prochain.
Le deuxième commandement dans l’ordre du naturel, c’est « Je vous donne un commandement : aimez votre ennemi ». Je ne sais pas pour vous, mais j’ai envie de dire au Seigneur : non, Seigneur, tous les autres, mais pas lui ! Mais Jésus nous donne un « commandement » et pas juste un conseil… Aime ton ennemi, travaille à sa joie, et à son bonheur. Cela ne veut pas dire : sois collé, serré contre lui, on est bien d’accord ? Parfois, il faut prendre ses distances ! Mais aime-le, prie pour lui. C’est déjà la première étape : prie pour lui.
Et puis, le troisième commandement, c’est celui-là qui est le plus délirant. En le disant, ça passe, mais en réalité c’est délirant : « Je vous donne un commandement nouveau, aimez-vous les uns les autres, comme Moi je vous ai aimés. » Comment Jésus nous a-t-Il aimés ? En mourant sur la Croix… Sur le vitrail qui est au-dessus, on le voit en train de nous donner Son cœur, Il le sort de Sa poitrine pour nous le donner. Voilà comment Il nous aime ! Et nous sommes faits pour le même amour… Si vous êtes mariés depuis longtemps, c’est à cela que vous êtes invités ! Non, ce n’est pas très naturel, car en réalité, on veut bien se donner un peu, mais on veut garder le reste pour soi. Quand on se marie, quand on choisit d’aimer, de répondre à l’appel du Christ, on choisit de TOUT donner. Oui, ce n’est pas tout à fait naturel, et c’est pour cela que nous avons besoin de l’aide de Dieu, de l’Esprit Saint. C’est cela que veut dire la royauté du Christ, parce que, lorsqu’Il est sur la Terre, Il va passer par la mort.
IV – Accueillir Jésus comme roi
Au moment de son procès, Pilate lui dit « Alors tu es roi ? » Jésus ne nie pas, Il lui précise juste que son royaume n’est pas exactement ce à quoi il pense : Je ne suis pas un roi de la terre, Je suis le Roi de l’univers. Il ne le dit pas tout à fait comme cela, mais c’est de cette façon que l’Église l’a compris. Cela dépasse tout ce qu’on peut imaginer, Je suis Roi, c’est Toi qui le dis, Tu as raison… Et si nous voulons que le monde retrouve un peu d’ordre, il s’agit de faire entrer le Christ comme Roi chez nous, dans nos vies personnelles, dans nos familles, dans nos lieux de vie, de travail, dans nos paroisses. Que l’amour soit notre commandement, une décision, un commandement que nous voulions suivre chaque jour…
Il y a des moments où l’on passera à côté : c’est ce qu’on appelle le péché ; mais Dieu, Lui, sans cesse, veut nous combler de Son amour, de Sa grâce, de Sa force, pour que nous puissions nous relever et re-choisir d’aimer. Pour que nous puissions nous laisser pardonner, et pardonner nous aussi. Et viendra le jour où le Christ viendra, c’est aujourd’hui, Il commence à venir, Il veut s’installer dans vos vies, et dans vos cœurs, jusqu’au moment de la rencontre finale, définitive, le jour où, soit nous mourons et nous nous retrouverons face à Lui, et ce sera un jour de joie ; soit c’est Lui qui viendra, de toutes façons Il viendra, dans la Gloire, et ce jour-là, ce sera le plus beau jour de notre vie, et ce sera facile de L’accueillir comme Roi !
Un tout petit dernier mot : lorsque Jésus manifeste qu’Il est Roi, Il manifeste qu’Il est notre tête, notre chef ; mais cela implique aussi que nous, nous ne soyons pas des esclaves ou des sujets en décalage immense avec le Christ. Non, le Christ nous appelle et nous choisit pour faire de nous des frères, et faire de nous des rois avec Lui. Il a fait de nous un royaume, et des prêtres, Il veut que nous soyons rois avec Lui.
Alors, on peut lui poser la question : comment est-ce qu’on fait ? C’était le soir du Jeudi Saint, lorsqu’Il s’est mis aux genoux de Ses disciples pour leur laver les pieds, et Il a manifesté Sa royauté et Il nous a dit : « c’est un exemple que Je vous ai donné, pour que vous fassiez de même les uns pour les autres ». Cet appel-là est pour nous : serviteurs les uns des autres, voilà un titre de gloire, voilà un titre royal : c’est ce pour quoi nous sommes faits.