Homélie du 4e dimanche de Pâques,
le dimanche 21 avril 2024,
par l’abbé Gaël de Breuvand
Ac 4, 8-12 ; ps 117 ; 1 Jn 3, 1-2 ; Jn 10, 11-18
Le 4e dimanche de Pâques, on aime l’appeler l‘Évangile du Bon Pasteur, parce qu’il est tiré du chapitre 10 de l’Évangile selon saint Jean et, dans celui-ci, Jésus se présente à nous comme étant le Bon Pasteur. C’est bien ce qu’on a entendu aujourd’hui, « Je suis le bon pasteur, le vrai berger. »
I – Hors du Christ, point de salut
Quand on reprend la Première Lecture et qu’on voit Pierre en train d’enseigner aux enquêteurs qui viennent s’intéresser à ce qu’il vient de réaliser, autrement dit guérir un infirme, on voit que Pierre écarte tout notion de gloriole : ce n’est pas lui qui a guéri, ce n’est pas lui qui sauve, mais c’est au nom de Jésus que le salut est donné. « C’est au nom de Jésus que le salut est donné » : cette phrase est extrêmement importante, elle est aux fondements de la foi chrétienne. Elle est aux fondements de notre foi : c’est au nom de Jésus que nous sommes sauvés. Cela implique deux choses : d’abord que nous avons besoin d’être sauvés, et notre monde parfois a perdu le sens de ce point de vue-là : rien ne va plus mais ça va, on n’a pas besoin d’être sauvé… et la deuxième chose : pour être sauvé, il est une chose nécessaire et indispensable : on ne peut pas se passer du Christ, nous sommes sauvés en Jésus, et c’est Pierre qui le dit : « En nul autre que Lui il n’y a de Salut. »
Et cela répond à une question que parfois l’on se pose : un bon musulman, s’il est un bon musulman, peut-il être sauvé ? Non, il a besoin de Jésus. Un papou, s’il est un bon papou, peut-il être sauvé ? Non, pas par le fait d’être papou ou musulman, non, il faut connaître Jésus. On s’écrie : mais comme est-ce possible : il y en a qui n’ont jamais entendu parler de Jésus, ou pire, certains ont été détournés de Jésus par le mauvais témoignage des chrétiens, ils n’y peuvent rien ? Alors, pour eux, pas de salut ? En cela, l’Église nous dit qu’elle compte sur la puissance absolue et la miséricorde du Seigneur, et que Dieu, Lui, est bien capable de se faire connaître à ceux qui ont choisi d’avoir une vie juste et droite. Et lorsqu’Il se fait connaître, lorsque le Christ se fait connaître à tous ces gens qui ne L’ont pas connu, ils peuvent choisir d’entrer dans le salut du Christ, ou pas… En nul autre que Jésus, il n’y a de salut.
II – Devenir semblable à Dieu
Si nous avançons dans la Deuxième Lecture de saint Jean – on en est au chapitre 3 – on arrive sur la grande Révélation ; ce sera dans un chapitre où nous aurons ces mots tout simples : « Dieu est amour ». Mais, pour l’instant, on regarde comment Dieu nous aime, comment Il nous envoie Son fils Jésus, pourquoi ? Pour que nous puissions être en relation avec Dieu, que nous puissions nous laisser aimer par Lui et L’aimer en retour, comment aujourd’hui nous sommes des enfants de Dieu par le don de l’Esprit Saint que nous envoie Jésus. Qu’est-ce qui arrive, quel est le bonheur promis, quel est notre avenir ? Nous Lui serons semblables, et nous Le verrons tel qu’Il est. Le premier projet de Dieu pour nous, c’est ce que nous Lui soyons semblables ; cela nous l’a déjà été dit dans le chapitre 1 de la Bible : « Dieu crée l’Homme à Son image, selon Sa ressemblance, homme et femme Il les a créés » ; nous sommes faits pour ressembler à Dieu.
Comment serons-nous semblables à Dieu ? Ce n’est pas grâce à nos forces, parfois on peut tomber dans l’erreur qui s’appelle le volontarisme : ce n’est parce que je choisis de faire des choses bien que je deviens saint. Cela ne marche pas, même si on voulait faire toutes les choses bien, les meilleures du monde, nous n’arriverions pas à la hauteur de Dieu, on ne peut pas ressembler à Dieu comme cela. Pour ressembler à Dieu, il faut que Dieu nous fasse cadeau de Son amour et de Sa grâce, de Son amour gratuit. Il s’agit de l’accueillir, cet amour, et cette grâce, cet amour gratuit, grâce à Jésus, il s‘agit de l’accueillir dans nos vies, pour pouvoir Lui ressembler.
III – Un troupeau choisi pour coopérer à l’œuvre de Dieu.
Et on arrive à l’évangile, où Jésus dit « Je suis le bon pasteur, le bon berger », je prends soin de vous comme si vous étiez mon troupeau, comme si vous étiez mes brebis. C’est ce qu’Il nous dit. Jésus, si nous écoutons bien, nous appelle Son « troupeau » : ce n’est pas un « tas », un troupeau n’est pas en désordre, il y a un ordre. Je ne sais pas si vous avez vu un troupeau se promener, c’est assez impressionnant, cela part dans tous les sens et en même temps, il y a la brebis ou le bouc qui est en tête, et ensuite il y a un ordre, et à chacun sa place. Les brebis entre elles ne sont pas très cool s’il y en a une qui cherche à griller la priorité, il y a un ordre, chaque chose à sa place, chacun à sa place. Pour permettre au troupeau tout entier d’avancer le mieux possible vers le même objectif : les verts pâturages. Et ce troupeau est à la suite du berger ; et, là, on le voit bien « Je connais mes brebis et mes brebis me connaissent. » Effectivement.
Et puis, le deuxième point, c’est que Jésus nous compare à des brebis, et non pas des moutons, ce que je préfère nettement ! Chez la brebis, il y a une dimension maternelle, elle a des petits, il y a donc une fécondité ; nous sommes invités à être féconds, à porter du fruit, à donner de la laine et du lait, à avoir des enfants. Ce premier troupeau dont parle Jésus, c’est le peuple d’Israël, évidemment, mais, Il nous le garantit, Sa parole ne se limite pas seulement au peuple d’Israël, elle ne se limite pas : « J’ai d’autres brebis dans d’autres enclos. » Elle est pour tous. Et c’est encore vrai aujourd’hui, la Parole de Dieu ne s’adresse pas qu’aux soixante personnes que nous sommes : il y en a un peu autour de chez nous qui n’ont pas entendu parler du Christ, qui ne Le connaissent pas, qui ne savent pas écouter Sa voix, et pourtant, c’est Sa voix qui est chemin de salut. Le Christ est monté au ciel, Il est parti dans Son ascension, Il n’est plus là physiquement, substantiellement, concrètement présent avec nous, mais spirituellement et, nous le savons, rituellement, mais a priori nous ne L’avons pas entendu avec nos oreilles. Et pourtant Il est là, Il choisit de se rendre présent par Sa parole, elle nous est donnée aujourd’hui. Il se rend présent par Ses sacrements, mais Il a choisi de se rendre présent par l’Église. L’Église, c’est à la fois le peuple de chrétiens, celui de Dieu, à la fois une institution humaine avec ses limites et ses faiblesses, à la fois un don, un corps, à la fois une construction, un temple – tout cela, ce sont des images que l’on donne de l’Église – et Jésus a choisi de nous appeler pour être, nous, les relais de Sa parole.
En réalité, Jésus est le bon berger, et il s’agit que nous Lui ressemblions, il s’agit que nous aussi nous soyons des bons bergers, des vrais pasteurs, et tous, autant que nous sommes, nous avons une mission de converger, évidemment les parents pour leurs enfants, mais pas seulement, les époux pour leurs épouses et les épouses pour leurs époux, pour converger, mais aussi lorsque nous sommes dans une association d’entreprise… Toute notre vie, nous sommes dans un tissu avec des subordinations et des subordonnés. On n’a pas à être des petits chefs, non, il ne s‘agit d’être des bons bergers qui prennent soin de leurs brebis, qui veulent les faire grandir, qui veulent leur donner de la joie ! Et Jésus a choisi, dans Son église, tout particulièrement, des hommes, douze, pour leur donner la mission d’être bergers. On l’entend à la fin de l’Évangile selon saint Jean, lorsque Jésus s’adresse à saint Pierre : « Sois le pasteur de mes brebis, sois le pasteur de mes agneaux », avec trois missions principales : celui du gouvernement, de la conduite, il s’agira de marcher devant et d’avancer, et les brebis suivront, et le troupeau suivra, vers le Christ lui-même ; il s‘agira d’enseigner pour nourrir les intelligences et les cœurs ; il s’agira de sanctifier en faisant le don de soi pour transmettre le don de Dieu. Les évêques reçoivent cette mission-là à la suite des apôtres, celle de gouverner, conduire, celle d’enseigner et former, éduquer, et celle de sanctifier. C’est la mission propre des évêques. Mais un évêque pour deux millions d’habitants, cela ne serait pas suffisant, donc les évêques ont eu besoin d’aide : ce sont les prêtres, qui sont connectés aux évêques. Notre mission dépend vraiment de ce qu’est l’évêque, notre être dépend de ce qu’est l’évêque ; un prêtre qui dirait : ‘non, pour moi, plus de connexion avec l’évêque’, il perd son sens, il s’étiole, comme une feuille qui se détacherait de son arbre. Et moi, avec ma mission de prêtre, de curé, j’ai mission d’être pour vous un gouvernant, un éducateur, et un sanctificateur – pas grâce à moi, la sanctification, c’est celle que Dieu donne, et moi je suis invité à être le canal, le transmetteur –
Et en ce dimanche du Bon Pasteur, et c’est vraiment la conclusion, la fin, c’est l’occasion de prier pour que le Seigneur appelle – cela, on sait qu’Il le fait – mais surtout pour que les jeunes répondent, pour être à leur tour des relais du bon pasteur, être à leur tour des prêtres selon le cœur de Dieu, des prêtres qui prendront soin du troupeau, des prêtres qui relaieront la voix de Dieu, la voix du Seigneur, qui porteront Son amour et Sa tendresse partout où elle est attendue, où on en a besoin.