Homélie du dimanche de la Résurrection du seigneur, 31 mars 2024,
Par l’abbé Gaël de Breuvand,
Il s’agit de la transcription d’une prédication orale. Les titres sont ajoutés après transcription.
Intro – C’est une personne que nous aimons, et pas un concept !
Le Seigneur est ressuscité. Voilà une bonne nouvelle. Pourquoi ? C’est ce que nous disait saint Paul : « Si le Christ est ressuscité, nous ressusciterons ! ». Si l’on faisait un sondage parmi ceux qui disent : « je suis chrétien », et qu’on leur demandait : « Est-ce que vous croyez au Christ, est-ce que vous croyez que Jésus est véritablement né ? A véritablement vécu ? Est véritablement mort ? ». Sur tous ceux qui se disent chrétiens, on aura un bon taux de réponses positives : « Oui, je crois cela ! ». Si on continue en leur posant la question : « Croyez-vous que ce Jésus, qui est véritablement né, a véritablement vécu, est véritablement mort, trois jours plus tard, est véritablement ressuscité avec son corps, le sien et pas celui d’un autre, – il ne s’est pas réincarné -, croyez-vous qu’il est vraiment ressuscité ? » Eh bien le chiffre va s’effondrer. Les statistiques seront beaucoup moins bonnes. Or ce qui fait notre foi, ce qui fait que nous voulons et aimons croire en Dieu, c’est que Jésus est ressuscité. C’est saint Paul, encore, qui le dit : « si le Christ n’est pas ressuscité, notre foi est vaine ! ».
Nous sommes attachés à une personne, qui est Dieu, qui nous aime à la folie et qui a tout donné pour nous. Nous ne sommes pas membres d’une religion avec une gentille morale. Non. Nous n’avons pas des valeurs. Non. Nous sommes attachés à une personne, Jésus-Christ, fils de Marie et Fils de Dieu.
I – l’Espérance est morte !
Revenons 2000 ans en arrière. Marie-Madeleine… Elle est connue de Jésus depuis longtemps, elle suit Jésus depuis peut-être deux ans, presque trois ans. Et on nous a même dit que Marie-Madeleine avait été libérée par Jésus de sept démons. Elle a été libérée ; elle était enfermée, elle était emprisonnée. Elle n’était pas libre. Elle a été libérée et elle a suivi Jésus. Elle écoute Jésus, elle croit à Jésus. Et lorsque Jésus meurt sur la croix, pour elle, comme pour tous les autres disciples, c’est la fin de l’histoire. Et c’est terriblement triste. Les disciples d’Emmaüs, – c’est le texte d’évangile qui est lu lorsque la messe est dite le soir de Pâques -, sont sur le chemin, partent et quittent Jérusalem, et ils sont en train de se lamenter : « Ah… Il parlait quand même tellement bien ! On espérait que ce serait lui qui viendrait nous libérer, c’est lui qui serait devenu le grand roi d’Israël et qui aurait fait de nous des vainqueurs. On s’est encore plantés. On a suivi un perdant. Et pourtant, ce qu’il disait, qu’est-ce que c’était intéressant ! ». Et tout est fini… Cette pensée-là, aucun doute, les apôtres l’ont, les autres femmes l’ont, Marie-Madeleine… Tout le monde l’a. Même les romains, les pharisiens et les chefs des prêtres pensent que l’histoire est finie.
Donc on est au fond du trou, mais Marie-Madeleine a aimé Jésus ; A la fois il lui faut rendre un dernier hommage à ce corps en prenant soin de ce corps. C’est aussi le moment de faire son deuil. Sans aucun doute Marie sait que la vie continue, mais qu’il s’agit d’avancer – sur un chemin cahoteux – mais avancer dans l’Amour. Elle croit toujours en Dieu. Elle ne sait plus bien qui est Jésus, elle pense peut-être s’être trompée, mais elle vient. Elle découvre la pierre roulée, la porte ouverte. Et là elle panique : « Est-ce qu’on aurait volé le corps de Jésus ? » Elle s’en va prévenir Pierre, le plus ancien, et le disciple bien-aimé, – le plus jeune, certainement saint Jean -, et le plus jeune court plus vite ! Alors c’est lui qui arrive le premier. Mais comme il est poli avec les anciens, il va laisser passer l’ancien devant.
II – Il a vu et il a cru
Et là, que voit-il ? Il voit effectivement la pierre roulée, il voit du linge posé à sa place… Ce n’est pas très clair la manière dont cela nous est dit. Le texte grec n’est pas facile à traduire. Quand on entend son texte : « il aperçut les linges, posé à plat, ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus, non pas roulé avec les linges mais roulé à part, à sa place ». Imaginez-vous un tombeau. Il y a une sorte de banquette sur laquelle est déposé le corps, et là, quand on a entendu cette phrase, on a l’impression que le linge est bien rangé, comme dans un bon placard, avec les draps d’un côté, les serviettes de l’autre et les taies d’oreiller au milieu. Ce n’est pas tout-à-fait ce que nous dit le texte, qui va un peu plus loin : Il nous dit en fait que le linge est resté à la place où il était quand il contenait un corps, et qu’il s’est, comme affaissé. Comme si le corps qui était dedans s’était dissous complètement. Des voleurs auraient eu besoin de dépouiller le linge… Là, il y a un indice. Et on voit le disciple bien-aimé qui arrive, qui entre et qui voit… et qui croit ! Il a vu, et il a cru. Il a vu quoi, Il a vu du linge affaissé, un tombeau vide… et il croit !
Et cela nous invite à réfléchir à ce qu’est la foi ; Qu’est-ce que c’est que de croire ? Je pense à un livre qui est sorti il y a deux ans et qui avait fait un peu discuter… je pense que ce livre est très bon, je vous le recommande, lisez-le ! Mais le titre est très mauvais : il s’appelle « Les preuves de l’existence de Dieu ». Et penser qu’il y a des preuves pour que Dieu existe, penser qu’il y a des preuves au sens scientifique du terme j’entends, au sens où cela doit emporter forcément notre adhésion, qu’il y a des preuves de la résurrection, c’est aller un peu vite. Non, il n’y a pas de preuves de l’existence de Dieu. Il n’y a pas de preuves de la résurrection… S’il y avait des preuves, croire ne serait plus un acte libre. On n’aurait pas le choix ! De fait, si là, Jésus, tout de suite, apparaît au milieu de nous, et nous dit : « Regardez : mes plaies, mon côté, mes mains », et encore plus, il est en mode transfiguration et il brille, parmi nous, et moi le premier, je pense que je me mettrai à croire. Bon… on est occidental… il y aurait un petit doute quand même. Mais il nous rajoute un ou deux miracles. Il nous multiplie quelques pains… et ça y est : je crois ! Est-ce que je crois vraiment ? Non. Je sais. Je suis convaincu. Mais croire, c’est un autre pas que cela. Croire, c’est poser un acte de liberté, de confiance, d’amour. Alors des preuves de l’existence de Dieu au sens scientifique et moderne du terme, [ce qui n’est pas tout à fait ce que disait saint Thomas d’Aquin quand il évoque les preuves de l’existence de Dieu] – le mot preuve n’avait pas tout à fait le même sens], non ! Par contre, il y a des indices pour croire que Dieu existe. Pour croire que Jésus est effectivement ressuscité. Et Jean, ce disciple bien-aimé, il a vu un tout petit indice, et il a cru.
III – Accueillir la Foi, raviver la Foi !
C’est le pas que nous sommes invités à faire, tous et chacun. Pour cela, il faut que nous ouvrions les yeux. Que nous ouvrions nos oreilles. Que nous ouvrions notre cœur. Les indices que Dieu nous donne ne sont que des indices. Ces indices ne vont pas nous sauter aux yeux en disant : « Bonjour, c’est moi ! ». Il va falloir que nous soyons attentifs, que nous levions les yeux vers Dieu. Et encore, même cela ne nous permet pas encore de croire. Il va falloir que Dieu lui-même intervienne et qu’il nous fasse le cadeau de la foi. Et que nous, nous accueillions ce cadeau et adhérions en réponse.
Certains me disent : « Moi, je suis sûr que ce que me dit Jésus est vrai. Je trouve que la foi chrétienne est la meilleure manière de vivre dans le monde, et la manière la plus cohérente d’avoir une belle vie humaine… mais je ne crois pas ». Je connais des gens qui aimeraient croire et qui ne croient pas. Et on peut penser que là, ce que Dieu ne leur a pas encore donné, – parce qu’il leur donnera tôt ou tard -, c’est le don de la foi. Mais ils sont rares, ceux-là ; La majorité, sont des personnes qui ont la foi, le don est fait, d’ailleurs, quand on est baptisé, on a reçu ce don de la foi, et on a un peu oublié le mode d’emploi. On a un peu oublié de s’en servir de notre foi. On a un peu oublié de se laisser regarder par le Christ et de le regarder en retour.
Alors, aujourd’hui, Pâques. On a la joie d’avoir quelques baptêmes. Ils vont recevoir le don de la foi. C’est l’occasion pour nous tous qui sommes là, dont un grand nombre est déjà baptisé, de se rappeler de notre baptême. Quand le prêtre a dit : « Je te baptise au nom du père, et du fils et du Saint-Esprit », ce qui se traduit par : je te plonge dans l’Amour même de Dieu, à ce moment-là, la voix du Père s’est faite entendre, et cette voix du père, elle nous disait, à tous et à chacun : « Tu es mon enfant bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie ».