Adorons le Seigneur qui nous veut libre

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Homélie du 4e dimanche de TO, B,
par l’abbé Gaël de Breuvand
Dt 18, 15-20 ; ps 94 ; 1Co 7, 32-35 ; Mc 1, 21-28

I  – Adorer en Esprit et vérité

« Aujourd’hui ne fermons pas notre cœur mais écoutons la voix du Seigneur » ce psaume 94 est prié par l’Église tous les matins. Prêtres, moines, religieux, religieuses, laïcs, commencent l’office des Laudes (au lever du jour) avec ce psaume. Et il y a ce grand cri : « crions de joie pour le Seigneur, venez, adorons le Seigneur qui nous a fait ». Adorons-le
Et vous l’avez entendu dans l’oraison du début de la messe nous avons demandé à Dieu de nous aider : « accorde-nous de t’adorer de tout notre cœur », « et d’avoir une vraie charité » pour tous. Car la vraie relation à Dieu est toujours connectée à la relation aux autres… car « celui qui dit, ‘j’aime Dieu’, et qui n’aime pas mon frère est un menteur » et celui qui dit ‘j’aime mon frère’ sans Dieu se leurre lui-même.
Et « adorer » c’est la bouche qui se rapproche, qui se rapproche de l’oreille de Dieu, pour qu’on puisse lui dire tout ce qu’on veut lui dire, c’est notre oreille qui se rapproche de la bouche de Dieu pour qu’on puisse écouter ce que Dieu veut nous dire. Finalement, c’est notre cœur                                                                                                                                                      qui se rapproche du cœur de Dieu. Adorer en vérité c’est se mettre en cœur à cœur avec Dieu.

C’est inscrit au fond de notre cœur, nous sommes faits pour cela. Et en même temps, c’est difficile, car Dieu n’est pas très palpable, car on ne le voit avec nos yeux, on ne l’entend pas avec nos                                                                                                                                                                                                                              
oreilles, on ne touche pas avec nos mains. Mais il s’adresse à nous : c’est bien pour cela qu’il nous envoie un prophète. Moïse était le relai de la Parole de Dieu pour le peuple d’Israël. Dieu fait une promesse « viendras un jour ou je ferais lever au milieu de tes frères un prophète comme toi » En réalité, on le sait, ce prophète sera même plus grand que Moïse. Et ce prophète c’est Jésus, car il nous porte la Parole de Dieu.

II  – Le jour du Seigneur, temps de l’action de Grace

Dans l’évangile selon saint Marc, on est au tout début, on a entendu le premier mot de Jésus la semaine dernière : « le royaume de Dieu est au milieu de vous, convertissez-vous, croyez à l’évangile ». Quand on dit « au milieu de vous », c’est là tout proche, c’est aussi là dans mon cœur, il nous est donné. Convertissez-vous, tournez-vous vers celui qui vous donne cette parole, croyez à l’Évangile et vous la connaissez cette Bonne Nouvelle : Dieu nous aime.

Et il nous aime jusqu’à tout donner pour nous, et Jésus enseigne. On est le jour du Sabbat, ce jour consacré au Bon Dieu, on lui donne un peu de notre temps, on revient sur l’essentiel. Un bon dimanche (ou le sabbat des juifs), on a eu le temps de prier le Seigneur, et on a eu le temps d’aimer nos frères. Et ce soir, on peut faire le point. A-t-on pensé un peu au Seigneur aujourd’hui, a-t-on pris le temps de lui rendre grâce ? C’est ce qu’on fait maintenant, mais l’a-t-on fait dans la journée ? A-t-on profité de ce jour pour prendre du temps pour nos frères, nos amis, nos proches, ceux qu’on aime et ceux qu’on veut aimer ?

III  – l’autorité pour ‘faire grandir’

Jésus, juif et fils de Dieu, le sabbat, il va à la synagogue et il reçoit la Parole de son Père. Dans la tradition juive (à la synagogue) il n’y a pas de clergé proprement dit, on appelle celui qui est un peu formé, et on lui demande de commenter la Parole de Dieu. C’est ce que fait Jésus. Et forcément, il la commente d’une manière très différente de tout le monde : « il n’enseigne pas comme les scribes » : forcément le scribe transmet une parole qu’il a reçue. Jésus, quand il parle, il est la Parole, et ce qu’il dit vient de lui-même, c’est lui qui se donne.

Il parlait en homme qui a « autorité ». Un beau mot ‘autorité‘. Auctoritas en latin, c’est la même racine que ‘augmenter’ : celui qui a autorité, c’est celui qui fait grandir, qui fait croitre, qui met en place les conditions pour ça pousse bien. Il y a une autorité parentale, il y a une autorité professionnelle, il y a une autorité dans l’ordre social ou politique ; Et l’on sait bien qu’il ne faut pas tirer sur l’herbe pour qu’elle pousse.

Il enseigne, et il veut faire grandir. Et sa Parole est toujours vraie aujourd’hui, et il veut toujours nous faire grandir. Alors si nous sommes de bonnes plantes qui désirent pousser, il ne faut pas ouvrir le parapluie ! et bien se laisser arroser par la parole de Dieu. Aujourd’hui ne fermons pas notre cœur.

IV – Dieu nous veut libre

Dans le deuxième moment de cet évangile, après avoir parlé Jésus est interrompu par un homme possédé… possédé au point de parler au pluriel. La présence du mal dans le cœur de l’homme le fracasse, le réduit en petit morceau… « que nous veux-tu » « es tu venu pour nous perdre ». Et Jésus intervient, il donne une parole de libération, d’unification, Jésus libère. Et c’est bien le projet de Dieu pour nous, il veut nous rendre libre. C’est le premier miracle de Jésus dans l’évangile selon saint Marc… il fera bien des guérisons physiques mais son but premier, la volonté première de Dieu, c’est de nous rendre libre ; Car la liberté est nécessaire à l’amour, et nous sommes fait pour cela. Dieu nous veut heureux donc il nous veut libre pour que nous puissions aimer en vérité… aimer Dieu, aimer son prochain évidemment, et s’aimer soi-même et lorsqu’on est trop divisé dans notre cœur, c’est difficile de s’aimer soi-même. Là, Jésus nous unifie. Pour cela il faut que l’on s’expose à Jésus, qu’on le laisse faire, qu’on lui demande.

Cette question de la liberté est au cœur du passage de la 2e lecture que nous avons lue. Ce texte est un peu surprenant : « j’aimerai vous voir libre de tout souci » jusque là tout est cohérent, « pour que nous puissions nous occuper des affaires de Dieu », et les affaire de Dieu, c’est aimer Dieu, aimer son prochain en s’aimant soi-même.

Et là Paul explique que la vie de couple est un vrai frein à cette liberté et nous conseille de ne pas nous marier. On a envie de s’insurger, de ne pas être d’accord…
Quand on lit Paul, quand on lit la bible en général, il faut s’intéresser au contexte… Paul écrit aux corinthiens, pour qui la vie morale, et spécialement en matière conjugale, est un peu désordonnée. C’est une des très grandes villes de l’empire romain, c’est un port et comme « dans le port d’Amsterdam, les marins boivent, et reboivent ». La vie conjugale, la vie sentimentale est donc compliquée. Le conseil de saint Paul est donc d’arrêter de se compliquer la vie : ‘choisissez la simplicité’, ‘choisissez une vie libre pour pouvoir véritablement aimer Dieu’. Mais – et c’est très intéressant chez saint Paul – il distingue toujours ce qui est une parole de Dieu qu’il a reçu et qu’il transmet (« Je vous transmets ce que j’ai moi-même reçu » ou « je vous dis de la part du Seigneur »), des conseils qu’il donne, qu’il assume, mais ne sont pas loi divine.

Ainsi, ici, nous sommes tous appelés à nous marier, mais certains ont pu recevoir (ou recevront) un appel particulier pour le célibat… mais nous sommes tous faits pour nous aimer les uns les autres et spécialement dans le mariage. Et… on peut : l’expérience de 2000 ans d’histoire de l’Église et de nombreux saints montre qu’il est possible de servir les affaires du Seigneur en aimant sa femme et en aimant son mari ! C’est même un chemin privilégié, pas toujours facile. Normalement, le mariage est le lieu ou les conjoints se font la courte échelle pour atteindre le ciel, et parfois, on se fait des croches-pattes. On se tourne alors vers le Seigneur, on lui demande son aide… il nous veut heureux.

« Aujourd’hui ne fermez pas votre cœur, mais écoutez la voix du Seigneur »

A chacun le Seigneur dit : « Viens, viens. Viens poser ton cœur contre mon cœur, ta bouche contre mon oreille, ton oreille contre ma bouche, et tu pourras entendre la parole d’Amour que je veux te dire, tu pourras me dire la parole d’amour qui te comblera. Je te remplirai de mon amour et il débordera de toi, et tu seras capable d’aimer en vérité, de tout ton cœur ».

Et alors sans aucun doute, c’est là le vrai bonheur et la vraie joie