Quiconque se déclarera pour moi devant les hommes… 12e dimanche du TO – A

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Homélie du dimanche 25 juin 2023, par l’abbé Gaël de Breuvand,
12e dimanche de TO – A

I – Jugement et pédagogie

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la fin de cette parole de Dieu de l’Évangile est un petit peu dérangeante : « Moi, celui qui me reniera devant les hommes, moi aussi, je le renierai devant mon Père qui est aux cieux. » Alors se pose une question pour nous : Jésus voudrait-Il nous condamner, nous éloigner de Lui ? C’est une parole qu’on entend ici, dans l’Évangile selon saint Matthieu, mais on l’entend dans d’autres endroits. « Allez-vous-en, loin de moi, vous qui avez fait le mal », une autre parole, encore chez saint Matthieu.

Il semble bien qu’il y ait, dans la relation avec le Christ, un moment où il y a une sanction qui tombe. Et cela nous semble un peu contradictoire avec ce que l’on sait de Dieu. Et en fait, on a raison d’être un peu surpris : parce que, vous le savez, la Bible tout entière doit se lire comme un tout ; un passage d’Évangile n’a aucun sens s’il n’est pas relié à ce qui précède et à ce qui suit, à ce qui a été écrit 500, 1000 ans auparavant, et, réciproquement, ce qui a été écrit dans l’Ancien Testament ne peut se comprendre que si on a Jésus qui vient nous en donner le sens. Alors, cette parole-là, cette parole de Jésus, qui est une parole sévère, est vraie. Et, en même temps, elle est d’abord là comme un point de pédagogie : attention, voilà ce qui est vraiment important.

Alors il faut se poser cette première question : à qui s’adresse Jésus ? Il s’adresse à Ses apôtres, à Ses disciples, aux plus proches. Et à eux, Il a donné la clé des mystères de Dieu, à eux, Il a dévoilé ce qui est essentiel dans nos vies. Et vous le savez bien, l’essentiel se résume à un commandement : « Écoute, Israël, le Seigneur est un, tu l’aimeras de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit, et tu aimeras ton prochain comme toi-même. » Et c’est complété par un deuxième commandement : « Aimez-vous les uns les autres, comme moi, je vous ai aimés. » Ne faites pas semblant… C’est cela le cœur de la foi chrétienne, relation à Dieu, relation aux autres, et alors lorsque nous sommes dans l’amour, comme cela, nous nous accomplissons. Ses disciples, Ses apôtres, sont au courant de la parole de Jésus. Nous sommes au chapitre 10 selon saint Matthieu et Jésus est en train de les envoyer en mission : ‘vous avez un trésor, vous connaissez le mystère de Dieu, et votre mission est d’aller le porter au monde. Votre mission c’est d’accueillir l’amour de Dieu dans vos vies, pour aller le répandre, pour aller le donner’.

II – Engager sa vie

La phrase qui précède, juste avant, est : « Quiconque se déclarera pour moi devant les hommes, moi aussi je me déclarerai pour lui devant mon père qui est aux cieux. » Il semble bien que nous sommes face à un choix. Et finalement, ce choix, ce n’est pas Dieu qui le fait. Il ne dit pas : toi, viens à moi, je t’ai choisi, ou, non, toi, va-t-en, parce que je ne t’ai pas choisi. Ce que Jésus veut nous faire comprendre, c’est qu’Il nous appelle tous, et tous Ses disciples, et tous Ses apôtres. Il appelle Pierre, Il appelle André, Il appelle Jacques, Il appelle Jean et Judas. Ils sont tous appelés et tous envoyés, et ils ont tous à témoigner du Christ : « Le Christ Seigneur est le Fils de Dieu, Il est le Messie, l’Envoyé de Dieu, Il nous apporte la Bonne Nouvelle du Salut. Il nous appelle à aimer et surtout à l’accueillir, Lui, pour que nous soyons capables d’aimer comme Lui ». Et tous, nous sommes appelés, et nous sommes invités à faire un choix, c’est nous qui le faisons. « Est-ce que je réponds à l’appel de Dieu lorsqu’Il me dit : ‘Viens, viens, sois mon ami, reçois ta part d’héritage, viens, partage avec moi la mission que Je te donne, le projet que J’ai pour le monde’. » Et nous sommes invités à y répondre, et à répondre « oui, voici je viens » comme Jésus a répondu « Voici, je viens, qu’il me soit fait selon Ta parole » Ou bien nous pouvons rester à distance ; et si j’y reste, je fais comme s’Il ne m’avait pas parlé, ou alors je fais celui qui entend « oui, oui » et puis qui ne fait rien ; ou encore pire, je détourne Sa parole et j’en fais une adaptation à ma sauce. Et là, lorsque je prends position : le Christ valide d’autres voies de proposition, car Dieu est absolument respectueux de notre liberté. Il ne nous contraindra pas à être son ami, Il nous tend la main, Il le fait mais souvent Il nous envoie son Esprit, des gestes, des personnes, des actions, toutes sortes de choses, de signes, Il nous appelle, mais Il ne nous contraindra pas à être en relation avec Lui, Il ne nous contraindra pas à L’aimer. Alors, si je prends position pour le Christ, Lui aussi prendra position pour moi. Il constate le choix que je fais. Si je reste à distance, le Christ aussi restera à distance, Il ne s’imposera pas à nous. Parce que, vous le savez, si dans l’amour il n’y a pas de liberté, cela ne s’appelle plus de l’amour. L’amour sous contrainte, je n’y crois pas, et Dieu non plus. C’était ce qu’on avait entendu il y a quelques semaines lorsque Jésus disait « Celui qui ne croit pas est déjà jugé ». Juste avant Jésus a dit : « Je ne suis pas venu pour juger le monde, Je suis venu pour le sauver ». Et Il continuait : « Celui qui ne croit pas est déjà jugé », cela paraît presque contradictoire. Mais c’est encore la même histoire ; on ne parle pas de celui qui ne croit pas parce qu’il n’a pas eu les moyens de croire, il est dans l’ignorance, non, on parle de celui qui prend position : ‘Dieu m’appelle à aimer, mais aimer c’est trop dur pour moi, Il me pardonnera de toutes façons’. Non, cela ne marche pas. On n’aurait pas l’idée de le faire dans une relation humaine. Alors pourquoi est-ce qu’on aurait l’idée de le faire avec Dieu ? Il nous prend au sérieux, Il croit en nous, Il croit, parce qu’Il nous a faits, donc Il sait que nous sommes capables de nous engager, de donner notre vie, de répondre à l’amour qu’Il nous donne par l’amour, Il nous appelle et Il nous prend au sérieux.

III – Choisir la vie

En fait, cette parole-là vient en contradiction absolue avec une chanson que l’on entend : « Nous irons tous au paradis », c’est notre espérance, oui, mais c’est nous qui choisissons. On ne va pas au Paradis par hasard. Il faut choisir d’aimer et de se laisser aimer. Alors, il s’agit de prendre position, de se déclarer pour Jésus. Mais Jésus nous rassure, Il nous dit « Ne craignez pas. » plusieurs fois, au moins quatre fois. « Soyez sans crainte, vous valez plus qu’une multitude de moineaux » et chaque moineau est déjà précieux aux yeux du Seigneur. Le Seigneur est avec nous, Jésus nous accompagne pas à pas sur notre chemin de vie, il s’agit donc de nous, chacun, prendre position, engager nos vies, c’est la seule manière de trouver le bonheur et la joie. Alors, il s’agit de vivre ces commandements, les deux dont je parlais tout à l’heure, mais aussi toux ceux qui en découlent : l’amour vaincra, l’amour doit être premier dans nos vies, il s’agit d’accomplir notre être de chrétien, d’être ce pour quoi nous sommes faits, des membres du corps du Christ, des membres du peuple de Dieu, il s’agit d’être temple de l’Esprit Saint, que nous soyons rayonnants de l’amour de Dieu.

Or, par nos propres forces, on ne va pas y arriver, et c’est pour cela qu’il nous faut accueillir le don de Dieu. Le don de Dieu, c’est Son amour. Le don de Dieu, nous l’accueillons dans la prière. Nous l’accueillons dans une vie sacramentelle, en accueillant régulièrement l’Eucharistie, le sacrement de pénitence et de réconciliation, en recevant la confirmation pour ceux qui ne l’auraient pas reçue. Il s’agit de développer notre être de prêtre, de prophète et de roi, parce qu’au jour de notre baptême nous avons été connectés à Jésus et nous avons cette mission à vivre avec Lui. Mission de prêtre, nous accueillons le monde dans notre cœur et nous le présentons au Père, seul Jésus est capable de le faire de manière parfaite, mais nous sommes connectés à Lui et nous le faisons avec Lui. Prophète, nous accueillons la Parole de Dieu et nous la laissons déborder de nous : cela doit se traduire en paroles et en actes. Seul Jésus est capable de le faire en vérité et pleinement, mais nous sommes connectés à Lui et nous le vivons avec Lui. Et roi, non pas comme un pharaon, mais plutôt comme un serviteur, comme un bon berger. Là encore, seul Jésus est le vrai roi, mais nous sommes connectés à Lui, par notre baptême, et il s’agit de nous mettre chaque jour au service de nos frères, au service du projet de Dieu pour l’homme.

Dieu veut que tout homme soit sauvé et Il m’a choisi, Il vous a choisis, Il nous a choisis, pour que nous soyons partie prenante de Son projet, pour que nous soyons Ses associés, Ses collaborateurs… alors, accueillons le don de Dieu et recevons la mission qui nous est confiée.