Par l’abbé Gaël de Breuvand
Il s’agit de la transcription d’une prédication orale. Les titres sont ajoutés après transcription.

I – Dieu veut faire alliance avec nous

Cette longue introduction à notre célébration. Sept lectures, des oraisons à ne plus savoir qu’en faire… Cette bénédiction au tout début, c’était une introduction. Introduction au projet de Dieu : il fallait que l’on entende encore une fois cette année que le projet de Dieu pour nous, c’est une alliance. Quelle chance nous avons d’être dans notre paroisse. Dieu veut faire alliance avec nous. Il veut nous faire entrer dans son alliance. Il l’a proposé à Adam et Eve. Et ça s’est mal terminé. Mais Dieu ne se lasse pas. Il est bien difficile d’engager notre liberté. Engager notre liberté, choisir en conscience, en ayant réfléchi aux raisons, aux conséquences. Engager nos vies, pour le meilleur. C’est cela à quoi nous sommes appelés. Entrer en alliance avec Dieu !

Et toute l’Histoire sainte est le récit de Dieu qui vient vers nous, qui nous appelle et qui nous tend la main : « Veux-tu faire alliance avec moi ? ». Et comment nous les hommes, nous répondons « oui », généralement, et combien peu de temps ça dure. Finalement, notre liberté n’est pas tout à fait engagée. On en garde un peu pour nous. Alors Dieu nous appelle, et comme dans le jardin des origines, après la chute, Il crie : « Homme, où es-tu ? » et ce soir encore, Il crie : « Homme, où es-tu ? » Je vais me permettre de citer un théologien pas tout-à-fait canonique, vous le connaissez certainement : Raymond Devos ! « Dans un petit village perdu, il n’y avait personne, et passant devant la vieille église, je suis entré. Et là, j’ai été ébloui par une lumière intense, insoutenable. C’était Dieu. Dieu en personne ; Dieu qui priait. Ah non, il ne se priait pas lui-même ; il priait l’homme. Il me priait moi. Ô homme, si tu existes, un signe de toi ! » Le Seigneur nous appelle, et Il nous attend. « Homme, où es-tu ? »

II – Le Fils accomplit l’Alliance pour nous faire fils

Ce cri de Dieu, Moïse, avant lui Abraham, Jacob et Isaac et après lui David, les prophètes, tous l’ont entendu et tous ont cherché à répondre. « Homme, ou es-tu ? » Je suis là Seigneur. Je viens faire ta volonté. Mais tous n’avaient qu’une réponse imparfaite, car vraiment, il est difficile d’engager notre liberté. On a toujours peur de se faire enlever quelque chose. Alors, comme le dit la liturgie, la lettre aux Hébreux, en ces temps qui sont les derniers, Dieu nous a envoyé son Fils et lorsque le Père appelle : « Homme, où es-tu ? » Lui Jésus, homme parmi les hommes, répond en notre nom : « Me voici ! Je viens faire ta volonté ! ». Et Lui, lorsqu’il répond, il engage absolument toute sa liberté. Il ne retient rien. L’alliance entre Dieu et les hommes est scellée définitivement en Jésus. D’une certaine manière, c’est la fin de l’Histoire. La victoire de Dieu est complète. Au niveau macro, au niveau de l’humanité, tout est accompli. Il ne reste plus qu’une question. Et cette question, c’est moi, c’est nous, chacun : « Homme, où es-tu ? ». Il y a quelques années, Romain a entendu ce « où es-tu ? ». C’est n’était pas extrêmement clair. Et puis cela s’est peu à peu éclairci, puis il s’est rapproché de la paroisse. « Je demande le baptême ». Et le Seigneur se réjouit. Aujourd’hui, cette alliance, qui a été scellée en Jésus-Christ va se sceller précisément dans le cœur de Romain. La victoire de Dieu est accomplie mais elle peut encore rayonner. Et aujourd’hui, Romain va entrer dans cette alliance, pleinement. Mais pour Romain qui va être baptisé et pour nous tous qui sommes baptisés, il reste difficile d’engager pleinement notre liberté. On en garde toujours un peu pour nous. On a toujours un peu peur que l’on nous enlève quelque chose. Mais nous sommes plongés dans la mort et la résurrection du Christ ? Nous avons commencé dans la nuit. Nous sommes maintenant dans la Lumière ; Cette lumière, c’est celle de Dieu qui nous illumine, c’est du Christ qui nous conduit. Toute notre vie prend sens. Nos actes bons participent à l’œuvre de Dieu. Nos souffrances, nos maladies, nos peines, nos solitudes participent à l’œuvre de Dieu.

III – Participer à l’œuvre de Dieu

C’est ce que nous allons manifester tout à l’heure, juste après le baptême, en couvrant Romain d’huile. Cette huile que l’on appelle saint-chrême, qui a été spécialement béni par notre évêque mercredi dernier. Cette huile, c’est celle qui fait les huilés. Les huilés en grec, c’est « christos ». Et en hébreu c’est « messiah ». Cette huile, qui fait les messies, les Christ, les Chrétiens, manifeste que Romain va être connecté au Christ. Il aura comme mission, car nous avons une mission sur la terre, – nous ne sommes pas baptisés pour dire que l’on fait partie d’un club, – c’est une mission, celle d’être prêtre, prophète et roi.

Quand je dis que nous sommes prêtres, c’est-à-dire qu’il y a un seul prêtre et ce prêtre, c’est Jésus. Par le baptême, nous sommes connectés à Lui et membres de Son Corps. Ce qu’il fait, nous le faisons ; Sa mission, nous l’accomplissons avec Lui. Par Lui, avec Lui, en Lui… Prêtre, nous voulons réunir le monde dans notre cœur et le présenter au Père ; Chaque fois que l’on prend un temps de prière, nous accomplissons notre mission de prêtre. Nous présentons le monde au Père. Chaque fois que nous prions une prière liturgique, une prière officielle de l’Église, nous présentons le monde au Père. Pour Lui rendre grâce, ou pour Lui demander…

Prophète ? Le Christ est le seul prophète, le prophète parfait. Parce qu’Il est la Parole de Dieu. Qu’est-ce que le prophète ? C’est celui qui reçoit cette Parole et qui la met en pratique et qui en témoigne. Nous sommes prophètes lorsque nous accomplissons nous-mêmes cette mission prophétique, lorsque nous accomplissons nous-mêmes cette Parole de Dieu. Non, être chrétien, ce n’est pas faire partie d’un club sympathique. C’est un appel, et un appel exigeant.

Et enfin, nous sommes rois ! Et là encore, nous pourrions nous tromper sur les termes. Roi, on pense pharaon ! Et donc mon trône et mes serviteurs… vous le savez bien, ce n’est pas comme cela. Son trône, c’est la croix. Son gouvernement, c’est le jeudi Saint, quand il s’est mis au pied de ses disciples pour leur laver les pieds. La encore, la royauté, que nous avons mission d’accomplir, n’est pas une sinécure. Alors pour quoi être chrétien ? Parce que nous sommes faits pour cela et c’est le seul moyen pour nous de trouver la vraie joie et le vrai bonheur. La vraie joie et le vrai bonheur, c’est cela ! En résumé, prêtre, prophète et roi, ce sont des mots savants. Très concrètement, il s’agit pour nous de donner de la joie à ceux qui nous entourent. Tous les matins, préméditons le bien que nous voulons faire. Et faisons-le. Accueillons la grâce de Dieu, qui nous aime et qui veut nous donner sa force, qui veut renouveler son Alliance avec Lui, chaque jour. S’Il nous appelle à venir le dimanche à la Messe, ce n’est pas pour nous embêter. C’est pour nous prendre contre son Cœur. Alors cette nuit sainte, écoutons le cri de Dieu qui résonne dans l’éternité : « Homme, où es-tu ? ».