Homélie du 5e dimanche de TO, année A.
Par l’abbé Gaël de Breuvand
Is 58, 7-10 ; ps 111 ; 1Co 2, 1-5 ; Mt 5, 13-16 ;
C’est la transcription d’une prédication ; le style reste oral…
La Parole de Dieu d’aujourd’hui nous dévoile une réalité absolument étonnante : c’est qu’au fond de notre cœur, il y a une lumière. Alors il nous faut revenir au tout début : « au commencement, Dieu créa l’homme à Son image, homme et femme, Il les créa », et un peu plus loin, au chapitre 2 de la Genèse, Dieu a modelé le corps de l’homme, et Il lui a « insufflé un souffle de vie ». La voilà, la lumière : Dieu est lui-même Lumière et Il nous a donné un souffle de vie, Il nous a donné Lui-même, et tout homme est créé à cette image, et donc tous nous avons cette capacité d’être lumière. Quel est l’intérêt de la lumière ? Elle éclaire, elle dévoile. La lumière, d’une certaine manière, n’est pas en tant que telle, mais elle montre ce qui existe. La lumière n’est pas pour elle-même, elle est tournée vers l’extérieur.
Et voilà que le prophète Isaïe, peut-être dans les années 500 avant J.-C., nous dit ce qu’il faut faire pour que la lumière soit tournée vers l’extérieur, pour que cette lumière se voie, « pour que Ta lumière jaillisse comme l’aurore (…) pour que Ta lumière se lève dans les ténèbres ». Il nous donne quelques pistes : « partage ton pain avec celui qui a faim, accueille chez toi les pauvres sans abri, couvre celui que tu verras sans vêtement, fais disparaître de chez toi le geste accusateur, la parole malfaisante ». Vous lirez…
Cette lumière est là, elle est présente, nous la portons tous en nous-mêmes, car Dieu l’a déposée en nous. La question est : comment faire pour qu’elle sorte de nous, pour qu’elle jaillisse, pour qu’elle se lève ? Isaïe nous dit : ‘posez des actes d’amour, posez des actes concrets. Si vous aimez, alors la lumière va passer’. Et cinq siècles plus tard, lorsque Jésus reprend cette image de la lumière, Il dit la même chose : « Vous êtes la lumière du monde. » C’est sans condition ! Lorsque on est au chapitre 5 selon saint Matthieu, Jésus a commencé Son discours au tout début du chapitre : c’est le discours sur la Montagne, c’est le discours des Béatitudes, qu’on entendu la semaine dernière ; et la foule qui est là, devant Lui, c’est une foule de disciples, au sens où ils ont les oreilles ouvertes. C’est cela, un disciple : c’est celui qui a l’oreille ouverte et le cœur ouvert. Celui qui accepte de se laisser enseigner ; autour de Lui ce ne sont pas encore des saints, ni même des apôtres. Autour de Lui, c’est une foule de gens qui acceptent de se laisser enseigner. Et Jésus leur dit : « vous êtes la lumière du monde ». C’est sans condition, nous sommes tous, chacun et ensemble, lumière du monde.
Et comme lumière, que choisissons-nous ? Choisissons-nous de nous laisser mettre sous le lit ou bien sous le boisseau ? Non, il faut que nous soyons sur le lampadaire. Et pour être sur le lampadaire, reprenons Isaïe et posons des actes concrets, d’amour. Continuons cette image du lampadaire. En haut de celui-ci, on met une lanterne : c’est cette bougie qui est entourée d’une plaque réfléchissante ; et puis, on met des parois en verre, ce qui permet à cette petite lumière d’éclairer beaucoup plus que ce qu’elle ne devrait. Lorsque nous posons des actes d’amour, concrets, du don de nous-mêmes, oui, la lumière passe. Les vitres sont transparentes. Et chaque fois que nous faisons l’inverse, que nous nous replions sur nous-mêmes, que nous sommes dans la paresse, dans le manque d’amour, c’est comme si nous passions une couche de peinture sur les vitres. À la première couche, il y a encore un peu de lumière qui passe, mais à la troisième, c’est mort !
De fait, nous avons à choisir : que voulons-nous être ? Dieu nous a créés pour que nous soyons des lumières, pour que nous rayonnions, et que notre rayonnement dévoile le réel, la vérité, dévoile ce qui compte le plus : « Voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux. » Nous sommes faits pour nous tourner vers Dieu, pour nous laisser aimer par Lui et pour L’aimer en retour. Nous sommes faits pour cela et, vous le savez, l’amour de Dieu, c’est aussi le salut des hommes : c’est en nous mettant au service de nos frères que nous rendons, aussi, gloire à Dieu. Il faut tenir les deux : celui qui dit j’aime mon frère et qui n’aime pas Dieu, il passe à côté d’une bonne partie de la vie. « Celui qui dit j’aime Dieu et qui n’aime pas son frère, celui-là est un menteur », c’est saint Jean qui nous dit ça. Il s’agit d’être lumière, mais ce n’est pas si évident… Si ça l’était, Dieu l’aurait dit une fois, au tout début, et puis il n’y aurait pas eu besoin de le répéter. Or, quand Isaïe le dit, puis Jésus le répète, en fait, entre-temps il y en a eu d’autres qui l’ont dit ! Choisissez d’aimer, choisissez d’aimer… Ce n’est pas si évident que d’aimer en vérité. Il a fallu le répéter de nombreuses fois, parce que nous sommes durs d’oreille, d’une part, et, d’autre part, nous avons en nous une tendance à choisir le chemin de la facilité, à choisir de se servir plutôt que de servir. Alors, nous avons besoin d’aide, et c’est Dieu Lui-même qui nous la donne, cette aide, c’est Dieu Lui-même qui aide, Il se donne à nous : c’est Jésus. Celui qui est la Lumière du monde par excellence, dans le sens où Il est absolument transparent à l’amour, c’est Jésus. Il l’a dit et on l’a entendu dans le refrain de l’Alléluia, « Moi, Je suis la lumière du monde, dit Jésus, celui qui Me suit aura la lumière de la vie. » C’est ce qu’on a vu aussi lors d’un événement dans la vie de Jésus, la Transfiguration. Les trois disciples ont vu la lumière de Dieu transparaître à travers le corps de Jésus, comme si Son corps était une vitre qui laisse passer la lumière.
Alors, nous voulons entrer en contact avec Lui. Comment faire ? Il nous faut écouter Sa parole. Il nous faut prendre le temps de la prière, pas forcément beaucoup. On ne demande pas de prier 4 heures par jour, mais de donner un peu de temps chaque jour ; 1% de notre temps… c’est un quart d’heure par jour !
Et puis le Seigneur nous aide dans les sacrements. Pourquoi je vous en parle ? Parce que nous avons eu la joie de donner le sacrement des malades à plusieurs de nos frères de notre communauté : à Genas, à Chassieu à la maison de retraite, à Saint-Bonnet aussi. Ce sacrement, c’est Dieu qui vient à notre rencontre, le Christ qui vient poser la main sur notre épaule lorsqu’on est malade, lorsque la mort vient, à plus ou moins brève échéance. Et le Seigneur, Lui, veut nous relever. Il veut nous connecter à Lui, comme lors du baptême, pour que nous soyons, comme Lui, des fils de Dieu. À la confirmation, Il nous a connectés à Lui pour que nous soyons des annonciateurs de la Bonne Nouvelle, comme Lui ! Et par le sacrement des malades, Il nous connecte à Lui pour que nous soyons, comme Lui, dans la souffrance et dans la maladie, et dans la mort, tout unis à Lui. Que notre souffrance et notre mort ne soient pas juste un truc insensé – car c’est à cela que cela ressemble – mais que, dans la souffrance et dans la mort, nous découvrions qu’il y a un chemin pour aimer, comme Jésus nous l’a montré, sur Sa Croix. Dans ce sacrement, le Seigneur nous soutient, nous relève, nous console et nous fortifie. L’objectif, là encore, c’est que nous soyons lumière, et que nous puissions rendre gloire à Dieu et permettre aux autres de rendre gloire à Dieu.
Dans quelques instants, nous poursuivons la messe. Pour nous, encore une fois, sont présentes la mort et la résurrection du Seigneur. Pour nous, nous est donnée la totalité de l’amour de Dieu. En communiant, nous allons nous unir à cette offrande du Christ pour être, comme Lui, absolument transparents à la lumière de Dieu, que Dieu a déjà déposée dans nos cœurs.