Soyez saint ! l’ambition chrétienne

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Homélie du 7e dimanche de Temps ordinaire A
Lv 19, 1-2.17-18 ; ps 102 ; 1Co 3, 16-23 ; Mt 5, 38-48

« Soyez saints, car moi, le Seigneur votre Dieu, je suis saint ». Il y a quelques années, alors que j’arrivais dans cette paroisse, dans l’une de mes premières homélies, j’avais dit « le projet, le but de notre vie paroissiale, le but de notre vie humaine, c’est d’être saint. » Un certain nombre de moues dubitatives avaient alors envahi l’assemblée… Être saint, qu’est-ce que cela veut dire ? On voit immédiatement quelque chose comme dans le vitrail, quelque chose qui ne bouge plus, mais qui est beau. Mais c’est un peu inatteignable, c’est notre première réaction, c’est quelque chose qui nous dépasse largement, et je ne suis pas sûr que cela fasse vraiment envie… en tout cas, pas l’image qu’on en a !

Alors, déjà, peut-être faut-il convertir notre regard : qu’est-ce que c’est qu’être saint ? D’autant plus que, quand Dieu parle, la raison pour laquelle nous devons être saints, c’est que Lui, Dieu, est saint. En réalité, Il nous renvoie immédiatement au chapitre 1 de la Bible, la Genèse : « Dieu dit : faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance ; et Dieu crée l’homme à Son image, à Son image Il les crée, homme et femme Il les a créés. » Nous sommes à l’image de Dieu, c’est inscrit en nous : dans l’acte même de création, Dieu nous a fait semblables à Lui. Nous sommes créés à Son image, nous sommes faits pour faire ce qu’Il fait ; eh bien, la sainteté, c’est Lui ! Donc, nous sommes faits pour être saints, Lui est Amour, nous sommes faits pour être amour. Cette image de Dieu qui est ancrée en nous, c’est une capacité :  nous en sommes capables ; et d’ailleurs les commandements que Dieu donne dans le livre du Lévitique : « Tu ne haïras pas ton frère, tu ne te vengeras pas, tu ne garderas pas de rancune contre les fils du peuple, tu aimeras ton prochain », ce sont des choses qui nous parlent, cela nous paraît sensé, cela semble à portée de main, ou presque…- mais le « ou presque » a toute son importance -… Mais c’est à portée de main. Nous sommes faits pour cela, nous sommes faits pour aimer, nous sommes faits pour être saints, et si nous vivons véritablement nos vies d’hommes, nous serons saints. Nous accomplirons ce pour quoi nous sommes faits.

Alors, il est intéressant de revenir au chapitre 1, « Dieu crée l’homme à Son image, à Son image Il le crée, homme et femme Il les a créés ». Dans le projet de Dieu : « faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance », il y avait deux termes, ‘image’ et ‘ressemblance’. Dans l’acte de création de Dieu, il y a l’image – et on insiste bien, deux fois, nous sommes à l’image de Dieu, – et ensuite, plus de ressemblance, mais un chemin « homme et femme », autrement dit une diversité, une distinction, autrement dit un appel à la relation. La ressemblance que nous cherchons, la sainteté que nous visons, elle se trouve dans cette relation-là : chacun avec les autres, à nous aimer les uns les autres ; et Dieu insiste sur l’homme et la femme, pourquoi ? Parce que la plus belle relation qu’il soit sur la terre, c’est certainement l’amour d’un homme et d’une femme, qui se donnent et s’engagent l’un envers l’autre pour s’aimer comme Dieu aime. Nous sommes faits pour cela ! Or, après des centaines d’années d’échec, parce qu’on n’y arrive pas, eh bien on n’y arrive toujours pas. Et, pourtant, Dieu revient sans cesse vers nous et nous dit : ‘Je suis près de vous, Je suis avec vous, Je vous envoie Ma Parole, Je vous donne Mes prophètes pour que vous vous convertissiez, que vous arrêtiez de manquer à l’amour, que vous arrêtiez de pécher’, parce que la plus grande victime du péché, c’est le pécheur – donc c’est moi ! – Alors, Dieu nous envoie Son fils, Jésus, Lui qui est Dieu, et Il nous redit les paroles de Dieu : « vous serez parfaits, comme votre Père céleste est parfait ».

Le projet ne change pas, le moyen évolue un petit peu. Le moyen, c’est : « vous avez appris qu’il vous a été dit ‘œil pour œil, dent pour dent’ – ce qui était une façon de nous limiter : seulement un œil pour un œil, pas plus ! – Moi, je vous le dis, ne ripostez pas au méchant : si quelqu’un veut prendre ta unique, donne-lui ton manteau, si on te réquisitionne pour faire 1000 pas, fais-en 2000 ». Jésus, en fait, en rajoute, Il ne nous rend pas le chemin facile ! Et plus encore : « vous avez appris qu’il vous a été dit ‘Tu aimeras ton prochain’, eh bien, Moi je vous dis : ‘Aimez votre ennemi’ » … et ça, autant les commandements de l’Ancien Testament sont à portée de main humaine, autant aimer notre ennemi, cela nous dépasse ! Imaginez quelqu’un dans la rue, avec sa clé, et qui est en train de rayer votre voiture : vous voulez l’aimer, lui ? Objectivement, moi, j’aurais du mal ! Et pourtant, c’est bien cela que Jésus veut pour nous. En réalité, l’aimer, cela ne veut pas dire être collé, serré, contre lui, cela veut déjà dire vouloir son bien, vouloir le meilleur pour lui, et, déjà, prier pour lui.

Mais c’est quand même au-delà de notre portée… et c’est pour cela que Dieu vient nous visiter. Cette parole de Dieu n’a de sens, et nous ne pourrons la mettre en œuvre, que si nous sommes connectés à Jésus, si nous vivons par Lui, avec Lui et en Lui ; si nous nous mettons à l’écoute de Sa parole, si nous nous laissons bousculer par elle ; si nous acceptons de nous laisser nourrir par Lui, si nous acceptons de nous remettre en cause, et de bien considérer que ce n’est pas nous qui avons les paroles de la Vie éternelle, mais Lui, Jésus. C’est un langage de folie, c’est ce que nous dit saint Paul. De fait, si on en parle à des gens qui ne croient pas, ils nous prendront pour des fous, en vérité. D’ailleurs, on se moque de nous : « eh, toi qui tends la joue gauche » … Nous pouvons le dire en toute simplicité : oui, c’est pure folie, même pour nous. Parce que, trouver des chrétiens qui, tous les jours, choisissent de vivre selon Ses commandements – qui, pour nous, sont des paroles de vie, ce ne sont pas des paroles auxquelles il faut obéir bêtement, c’est un chemin de bonheur et de joie – c’est cela que Dieu veut pour nous, cette folie-là, cette sagesse de Dieu. Il s’agit, chaque jour, que nous remettions devant nos yeux cette Parole, et que nous nous demandions comment la mettre en œuvre ; tout seul on n’y arrivera pas.

Saint Paul nous le dit, tout est à nous : le monde, la vie, la mort, le présent, l’avenir. Dieu nous a donné mission d’être les gardiens de ce monde et, si nous sommes gardiens, nous devenons partie prenante, mais nous devons toujours nous rappeler que nous sommes au Christ, et que le Christ est à Dieu. Le but de nos vies, ce n’est pas de réussir notre vie ; le but de notre vie, c’est d’être saint, et celui qui nous rend saint, c’est Jésus. Continuons à grandir en amitié avec Lui, continuons à vivre la relation avec Lui : c’est Lui qui nous envoie Son Esprit, c’est Lui qui vient habiter nos cœurs, pour que nous soyons dans la seule relation qui vaille : aimer.