Nuit de Noël : le petit pas de Dieu

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Homélie de la nuit de Noël, 24 décembre 2022
par l’abbé Gaël de Breuvand

Nous sommes le jour de Noël ; quatre semaines que nous étions dans le temps de l’Avent, le temps de l’attente ! Pendant ce temps de l’Avent, l’objectif c’était de laisser place libre pour le Seigneur. Et au moment de Noël, Jésus se propose d’occuper cette place libre. Alors, si jamais, pendant ces quatre semaines, on n’a pas pris le temps de faire cette place libre, on peut le faire maintenant ! Le Seigneur se contente de peu, Il l’a montré. Il y a 2000 et quelques années, Il est né. Et où est-Il né ? Là où il y avait de la place. Et où y avait-il de la place ? Dans le garde-manger, dans la mangeoire !

I – Jésus bébé, déjà donné en nourriture !

Jésus qui, quelques années plus tard, célébrera la première messe et dira : « Ceci est mon corps donné pour vous » – c’est ce que nous referons tout à l’heure – Il se donne à nous en nourriture. Eh bien, à Sa naissance, Il avait été déposé dans une mangeoire. N’était-ce pas déjà prophétique ? Il se donne en nourriture…

Les enfants, est-ce que vous vous souvenez dans quelle ville Jésus est né ? En Israël, certes, mais la ville ? À Bethléem. Quelle est est la signification de Bethléem ? « Beth », en hébreu, cela veut dire « la maison » et « lehem », en hébreu, cela veut dire « le pain ». C’est la maison du pain, Bethléem. Jésus, qui se présente à nous comme pain de vie, naît dans la maison du pain. Il se présente à nous comme nourriture, et Il naît dans une mangeoire… Original, prophétique…. Peut-être qu’il faut que nous la recevions, cette parole, et que nous nous disions : Jésus se donne à manger pour nous. Est-ce que nous ne pourrions pas en profiter ? Parmi nous, dans quelques minutes, une petite heure, nous avons préparé des bons repas, mais Jésus dit : la seule nourriture dont vous ne pouvez pas vous passer, c’est moi. C’est d’ailleurs pour cela que nous sommes ici. Si nous sommes dans cette église, c’est que nous croyons que, oui, Jésus a changé le monde, que, il y a 2022 ans à quelque chose près, quand Jésus est né, tout a changé.

II – La naissance du sauveur, un évènement inaperçu

Les enfants, savez-vous qui était au courant, lorsque Jésus est né ? Les Mages ? Non ! C’est plus tard… Au moment où Jésus naît, qui est au courant ? La première qui est au courant, c’est Sa maman… Neuf mois qu’elle le porte…, et il y a suffisamment de mamans dans cette assemblée pour savoir que lorsque le bébé arrive, on le sait. C’est d’ailleurs un peu étonnant, car il faut bien imaginer que lorsque Marie a reçu l’annonce de l’ange, il y a neuf mois – on l’a fêté le 25 mars, c’était l’Annonciation – ce jour-là, c’était un moment fort. Lorsque l’ange est venu, elle a senti la présence de Dieu, et ce jour-là elle est devenue enceinte. Mais, depuis, l’ange est parti, et la grossesse qui s’en est suivie était une grossesse normale, avec les inconvénients et les joies, il y en a certainement, je ne suis pas très compétent sur la question… Et quand le moment vient, la mère le sait. Il y a une deuxième personne qui était au courant de la naissance de Jésus : son père, Joseph, le mari de Sa mère, qui est un père un peu particulier, vous le savez, c’est un père adoptif. Vous le savez aussi, un père adoptif aime ses enfants, peut-être même encore plus qu’un père naturel. D’ailleurs, un bon père naturel ‘adopte’ ses enfants. Dans la tradition biblique, tout père se doit d’adopter ses enfants. Et donc le père adoptif, c’est le nec plus ultra du père. Certes, Joseph et Marie sont au courant que Jésus naît, mais cela ne change pas le monde.

Mais qui d’autre est au courant ? Personne ! Par contre, à peu près en même temps, il y a dans les champs les bergers, et eux, ils ont une visite, celle des anges. Et quand un ange vient, cela percute ! D’ailleurs, chaque fois que l’ange vient, il commence par dire : « Ne crains pas », « N’ayez pas peur ». Cela doit être impressionnant, de rencontrer un ange ! D’ailleurs, au cas où on aurait un doute « Gabriel » – que l’on rencontre souvent dans la Bible – cela veut dire « force de Dieu ». Un ange, ce n’est pas « mignon », c’est la « puissance de Dieu » qui se déploie et se manifeste. Et cet ange apparaît aux bergers, et il leur dit : voilà, vous allez voir le Sauveur d’Israël, la grande joie, le grand bonheur ; c’est Lui qui vient, le Messie attendu, et vous allez avoir un signe.

III – le signe discret de la présence de Dieu

Alors, moi, j’aurais été Dieu, le signe que j’aurais donné, cela aurait été un tremblement de terre, le tonnerre, des éclairs, de la foudre… Cela aurait été impressionnant, quoi ! Si Dieu est Dieu, qu’Il veut manifester Sa présence, il faut qu’on s’en rende compte…. Mais non, le signe que Dieu donne, c’est un petit Enfant dans une mangeoire. Vous avez déjà vu des petits enfants… Est-ce que c’est impressionnant ? Non, quand on sait ce qu’il va devenir, oui, ça nous éblouit, d’une certaine manière. Mais, pour un signe manifestant la présence de Dieu dans notre monde, je trouve que le chargé de communication du Bon Dieu… n’est pas top…  Vraiment ! Moi, j’aurais préféré que le Sauveur du Monde se présente comme un superman ! Il nous aurait protégé de tous les problèmes, de tous les dangers, il y aurait la paix dans le monde…

Mais non, ce n’est pas le moyen que Dieu choisit pour venir habiter au milieu de nous. Il choisit de venir habiter au milieu de nous comme un tout petit enfant, qui fait comme tous les petits enfants, c’est à dire que quand Il a faim, il pleure, on Le nourrit, Il se tait, et puis, ensuite, Il se salit, alors, à nouveau, Il pleure, il faut le changer, et puis à nouveau Il s’endort, et encore Il pleure… Un bébé, ça pleure beaucoup… Jésus est un bébé comme un autre, Il est complètement un homme. Il n’y a rien en Lui qui ne soit pas homme. Et, en même temps, Il est le Fils de Dieu, le Sauveur du monde, et il faut tenir les deux. Ce n’est pas un homme qui serait une sorte de « surhomme », ce n’est pas une sorte de demi-dieu. Non, Jésus est un homme, et cet homme est aussi Dieu. C’est Dieu qui vient au milieu de nous, et Dieu est un homme. Cela nous fait un peu exploser la tête… On ne peut pas vraiment le comprendre. On peut le dire, le croire et le proclamer. Parce que cela change tout.

IV – Dans notre monde qui ne va pas bien, Dieu a choisi d’habiter

Ça change tout ! Si notre Sauveur est un homme, Il est donc mon frère, Il est de ma famille. Si mon Sauveur est un  homme, je suis le frère du Sauveur et, par le fait même, je suis de la même famille que Dieu. Je suis de la famille de Dieu, et c’est cela la fête de Noël. Nous sommes de la famille de Dieu ! Dieu est venu habiter le monde en homme, pour que nous puissions, un jour, habiter le ciel en Dieu. C’est le but de nos vies. Et, aujourd’hui, on le découvre.

On va faire un petit constat : je ne sais pas si vous avez remarqué, mais notre monde ne va pas très bien. On est d’accord ? On a tendance à se dire que c’était mieux avant. Et plus on est ancien, plus on se dit que c’est pire qu’avant. La dernière fois qu’on m’a dit ça, la dame avait 97 ans, elle avait connu la guerre et elle m’a dit « c’est pire qu’à l’époque », alors elle me parle de la Seconde Guerre mondiale… Je ne sais pas si c’est pire, je ne suis pas sûr. Mais, il y a une différence, c’est que cela nous impacte plus, parce que la dimension ‘communication, média’, n’est pas la même. Il faut dire que nous, aujourd’hui, nous sommes au courant des combats, des difficultés, des guerres qui se passent à 5 000, 10 000, 20 000 km de chez nous. Et, du coup, on le porte, et chaque jour, c’est nouvelles après nouvelles qui viennent nous écraser un peu plus. Il y a trente ans, quarante ans, cinquante ans, soixante-dix ans, il y avait les mêmes problèmes, mais on n’en entendait pas parler. Mais, toujours est-il que le monde ne va pas très bien. Et que le Bon Dieu ayant choisi une drôle de méthode pour sauver le monde – c’est-à-dire au lieu de nous envoyer superman, Il nous a envoyé un petit bébé – eh bien, c’est qu’il faut entrer dans cette méthode-là, il faut accepter de jouer le jeu de Dieu. Alors comment faire ? Aucun de nous ne sera capable de sauver le monde, aucun de nous ne sera capable d’apporter la paix au monde, aucun de nous ne trouvera la solution contre la famine, la guerre, la maladie, etc.  Aucun ! Alors, on peut être un peu désespéré et se demander : à quoi bon ?

V – Le chemin des petits pas

En revanche, le Seigneur nous propose un chemin : c’est le chemin des petits pas. La question n’est pas : comment est-ce qu’on peut avoir la paix sociale en France ? Pour moi, ce n’est pas ça la question. Pour moi, la question c’est : comment, aujourd’hui, je peux faire grandir un peu de joie, un peu d’amour, un peu de paix ? Pas beaucoup, mais un peu. Beaucoup de familles ici vont rejoindre des familles plus larges après. Dans toutes les familles, il y a des blessures, des combats, des difficultés, des relations un peu tendues. Il y a des belles-sœurs, des belles-filles et des belles-mères, c’est compliqué. Il y a des frères, des sœurs, c’est dur, des cousins, n’en parlons pas… Le chemin que nous propose le Christ, ce n’est pas : magie, tout va mieux ! Non, c’est par petits pas. Aujourd’hui, je choisis d’être un peu plus patient avec untel ou unetelle. Aujourd’hui, je choisis d’être un peu plus délicat avec untel ou unetelle. Aujourd’hui, je choisis de manifester un peu mieux mon amour, ma tendresse, ma confiance. Aujourd’hui, les maris vont prendre un tout petit peu plus soin de leurs épouses, aujourd’hui, les épouses vont être un tout petit peu plus délicates avec leurs maris. Il n’y a pas besoin de faire un grand pas. On est un peu orgueilleux, et on a tendance à croire que si on ne fait pas un grand pas, cela ne sert à rien de faire un pas. Non ! Si je ne fais pas un grand pas, eh bien, j’en fais un petit. Ça marche ! Donc, je parlais des maris avec leurs épouses, des épouses avec leurs maris, on peut parler des parents avec leurs enfants, un tout petit peu plus de patience, un peu plus de tendresse, d’affection… Et puis, les enfants, comment faire grandir un peu de joie avec vos parents ? Pas besoin de me répondre maintenant, mais décidez-le. Aujourd’hui, ce soir, mais c’est vrai aussi pour demain et pourquoi pas après-demain, je décide de ne pas faire de caprice. Ce soir, je décide de ne pas bouder, de ne pas me disputer. Êtes-vous d’accord, les parents ? Les parents sont d’accord en tout cas ! Mais, de fait, il y a un effort réciproque, un peu plus de patience supplémentaire. Et, en réalité, c’est cela le combat de notre vie : ce n’est pas impressionnant, mais cela change le monde, comme la naissance de Jésus il y a 2000 ans. Ce n’est pas impressionnant, mais c’est le chemin de Dieu. Alors, comme on est un peu nuls, le Seigneur vient nous aider. S’Il vient, c’est pour être en relation avec Lui.

Et là, je vais faire la boucle avec le début. Il se donne à nous en nourriture pour nous donner la force de poser, chaque jour, un petit pas. Un petit pas d’amour, un petit pas de tendresse, un petit pas de confiance, un petit pas de patience. Et cette nourriture, je la reçois lorsque j’écoute la parole de Dieu. Rouvrez vos bibles ! Reprenez l’Évangile, relisez les trois premiers chapitres de saint Luc. Pas d’une traite : un petit bout chaque jour, comme une bouchée. Prenez le temps, chaque jour, de tourner votre regard vers le Ciel : le signe de la Croix : ‘Seigneur, je sais que Tu ‘aimes, et moi aussi je veux T’aimer’. Venez à la messe le dimanche, parce que le Seigneur veut s’offrir en cadeau, et ce cadeau, c’est Jésus. Le cadeau de Dieu Notre Père, c’est Jésus, pour que nous soyons, avec Jésus, des fils de Dieu.