Les Rameaux, le roi d’humilité et les disciples

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Le paradoxe de l’accueil triomphal à Jérusalem (Lc 19, 28-40)

Lorsque Jésus entre à Jérusalem, il est accueilli comme un roi. Un roi de gloire, qui est reconnu par les foules comme le messie, le descendant de David, celui qui vient délivrer Israël. Mais Jésus – s’il accepte les acclamations de son peuple – choisit de les bousculer. Il n’a pas choisi le cheval de guerre pour faire son entrée, mais un âne, et même un petit âne. C’est l’accomplissement d’une prophétie… mais c’est aussi un choix d’humilité : non, la royauté du Christ n’est pas selon les valeurs du monde (comment être digne sur un âne ?).

Lorsque Jésus entre à Jérusalem, son peuple l’accueille… mais il y a une résistance. Et cette résistance, elle vient essentiellement de ceux qui auraient dû être les premiers à l’accueillir : les pharisiens, eux qui ont fait profession de méditer la Parole de Dieu et de la mettre en pratique. Et là, ils ne reconnaissent pas, ils ne veulent pas reconnaitre le Messie qui vient !

Enfin, la réponse Jésus aux pharisiens nous invite à nous souvenir qu’Il est venu pour sauver la création tout entière : « Je vous le dis : si eux se taisent, les pierres crieront. » L’homme sommet de la création, est créé pour honorer et louer Dieu, et en lui toute la création chante le Seigneur. L’homme est appelé à se mettre au service de la création, pour lui donner voix (C’est ce qu’exprime saint Paul en Rm 8,19)

Disciple de Jésus dans sa Passion (Lc 22, 14 – 23, 56)

Homélie 10 avril 2022
par l’abbé Gaël de Breuvand

Il est l’innocent.

Lorsqu’Il a pris la parole, c’était pour annoncer la Bonne Nouvelle de Dieu :

Dieu nous aime, chacun de nous personnellement, aucun de nous ne peut se dire abandonné, nous sommes tous des perles, des merveilles.

Dieu nous aime !

Il était l’innocent, et tout ce qu’Il faisait, c’était le Bien : Il a guéri les aveugles, Il a fait marcher ceux qui boitaient, Il a rendu l’ouïe aux sourds, Il a pardonné aux pécheurs. Et voilà, pour tout cela, à cause de cela, Il est jugé, Il est condamné, et Il souffre Sa Passion, Il souffre sur la Croix, Il meurt, et nous Le déposons au tombeau. Il y en avait un certain nombre qui étaient là, au pied de la Croix, et qui sont responsables : on pense aux chefs des prêtres, aux Pharisiens, on pense aux Romains ; mais on pense aussi à tous ceux qui n’ont rien fait. Alors, on se dit que c’était il y a 2000 ans, donc ce n’était pas nous !

Mais voilà, où serions-nous ?

En fait, étonnamment, mystérieusement, nous sommes tous là au pied de la Croix, et nous ne sommes pas du bon côté. Nous sommes, peut-être, plutôt comme ces soldats romains qui se moquent et qui partagent le vêtement de Jésus. Nous sommes, peut-être, comme ces Pharisiens qui se moquent et qui n’entendent pas la Parole de Dieu. Nous sommes, peut-être, comme ce bandit qui a bien mérité d’être là et qui n’est pas capable d’accueillir le Salut que Dieu veut lui donner. Oui, d’une certaine manière, nous sommes tous responsables de la mort de Jésus. Pourquoi ? Parce que le projet de Dieu pour nous, c’est que nous soyons comme Lui, que nous aimions. Et si nous regardons l’intérieur de nos cœurs – en tout cas, si je regarde l’intérieur de mon cœur – bien trop souvent, je manque à l’amour. Et s’il y a un problème de paix dans notre monde, dans notre pays, c’est peut-être d’abord pour cela : parce que je manque à l’amour. Oui, je suis participant de la mise à mort du Christ en Croix. Mais Jésus avait vu ce destin, ces événements, arriver, et le soir du Jeudi saint, nous l’avons entendu, Il nous a dit : « Ceci est Mon corps, donné pour vous, ceci est mon sang versé pour vous », signe d’une alliance, en Jésus parce qu’Il a choisi de donner Sa vie, et personne ne la Lui a prise. Et parce que Jésus a choisi de donner Sa vie, nous devenons capables de l’accueillir, cette vie. Nous devenons capables de choisir l’amour.

Je vous invite à regarder deux figures, deux personnages, de cet Évangile. Tout d’abord, Pierre : « Simon, Simon, je prie pour que ta foi ne défaille pas », dit Jésus. Et Pierre, un peu fanfaron – un peu comme moi – dit : ne T’inquiète pas, Seigneur, si tous T’abandonnent, moi je serai près de Toi, jusqu’à la mort s’il le faut !  Et quand on lui demande : Alors tu es un ami de Jésus ? Il dit non… Et il ne le dit pas qu’une fois… et quand il a dit non, une fois, deux fois, trois fois, là, Jésus le regarde…

Mettons-nous en présence de cet événement : le regard de Jésus sur Pierre. Nous connaissons Jésus : quel est ce regard ? C’est le regard qu’Il pose sur chacun de nous, c’est un regard d’amour, mais aussi de compassion, parce qu’Il sait à quel point Pierre s’est blessé lui-même en reniant Jésus. Il sait à quel point nous nous blessons nous-mêmes, quand nous choisissons autre chose que d’aimer. C’est un regard d’amour, un regard de compassion. C’est un regard qui invite aussi au relèvement, mais Pierre n’en est pas encore capable : il s’en va et il pleure amèrement.

La deuxième figure, ce deuxième personnage, que je vous invite à regarder, c’est ce bandit, ce malfaiteur qui est à côté de Jésus. Peut-être a-t-il commencé par provoquer, insulter Jésus… et puis… il se rend compte : « Celui-là est innocent, mais nous, si nous sommes là, c’est que nous l’avons bien mérité. » Et pour mériter le supplice de la Croix, il faut le faire ! Il se tourne vers Jésus, et c’est lui qui est le premier à accueillir vraiment le Salut que Jésus lui donne, le pardon de Dieu. « Seigneur, accueille-moi dans Ton royaume. » Et là dans la souffrance de Jésus sur la croix – et, vous le savez, le supplice de la croix est certainement une des plus terribles mises à mort qui soit, c’est long, douloureux, c’est angoissant, au sens propre, dans le sens où ça contraint la poitrine, ça étouffe – Jésus, dans cette souffrance-là, accomplit exactement ce pourquoi Il est venu. Il donne le Salut à ce malfaiteur qu’on appelle Dismas et dont on a dit qu’il était le plus grand voleur du monde, parce qu’il a volé même son paradis. Il a su se tourner vers Dieu, et accueillir Son amour, parce que Dieu nous aime, Il ne se lasse pas de nous aimer, il n’y a pas un moment où Dieu ne nous aimera pas. Et si nous voulons accueillir l’amour de Dieu dans nos vies, si nous voulons rayonner de cet amour, il s’agit de laisser Dieu venir en nous. Il faut Lui dire : oui ! Il s’agit de faire ce que Dieu veut : « non pas ma volonté, mais La Tienne ». Il s’agit de faire ce que fait Jésus : donner notre vie. Car c’est là le Salut, c’est là notre destinée, en tout cas le projet de Dieu pour nous. Nous sommes faits pour donner notre vie, comme Jésus l’a fait, donner notre vie à Dieu, donner notre vie aux frères, aux hommes.

Aimer Dieu, aimer nos frères, c’est ce que nous allons vivre dans l’Eucharistie, lorsque nous viendrons communier. La communion, c’est Jésus qui vient se donner à nous comme nourriture, mais ce n’est pas seulement cela, c’est aussi une démarche de notre part pour que nous puissions nous offrir au Père et nous offrir aux frères, et les deux sont nécessaires. Nous sommes invités à être, aujourd’hui, chacun de nous, des Christ, des Jésus, donnés au Père, aux frères.