Homélie du 8e dimanche du Temps ordinaire, Année C, 27 février 2022
par l’abbé Gaël de Breuvand
Il s’agit de la transcription d’une prédication orale. Les titres sont ajoutés après transcription.
Homélie 28 février 2022
par l’abbé Gaël de Breuvand
Il y a des dimanches où la Parole d’Évangile qui nous est donnée nous fait trouver : « Acclamons la Parole de Dieu » un peu difficile – En tout cas, ça m’est un peu difficile. – parce que Jésus nous secoue : Jésus veut nous réveiller – on l’a chanté ! – et donc il faut ouvrir nos oreilles et notre cœur, et accepter de se laisser déranger.
Parce que… On se connaît, moi le premier : la Parole de Dieu, on l’entend tous les dimanches et un peu plus, puis à force cela finit par faire une jolie musique qui ne nous dérange pas trop. Et là, Jésus nous bouscule, encore une fois, comme souvent, et nous sommes invités à faire un pas vers Lui.
I – Paix, mort, péché
Aujourd’hui, au cours des textes que l’on a entendus pendant cette messe, en prenant en compte la prière d’ouverture, l’oraison, nous aurions trois mots qui ont du sens, aujourd’hui, et sur lesquels nous sommes invités à revenir. Le premier mot c’est le mot de « paix », nous avons demandé à Dieu qu’Il « accorde la paix selon Sa volonté » pour que nous puissions vivre en chrétiens, dans la sérénité, et vous le savez, on en a bien besoin de cette paix.
Le deuxième mot, c’est la « mort », c’est la mort dont saint Paul nous dit « Mort, où est ta victoire, où est ton aiguillon ? » Et pourtant, lorsque nous ouvrons les yeux, nous regardons autour de nous, et nous avons souvent l’impression que la mort est vainqueur. Mais, voilà, ce n’est pas ce que dit saint Paul.
Et puis le troisième mot, c’est le mot « péché », vous savez ce gros mot dont il ne faut pas trop parler. Celui qu’on esquive parce que, peut-être, on n’a pas bien compris ce que c’était. L’aiguillon de la mort, c’est le péché. C’est ce que nous dit saint Paul. Le péché, c’est ce qui s’oppose à la vie. Et qu’est-ce que c’est que vivre, pour nous, chrétiens, qui croyons que Dieu est vie, que Jésus est la Vie ? Il nous le dit : « Je suis le chemin, la Vérité et la Vie ». Eh bien le péché, c’est la mort, au sens où c’est l’absence de la vie divine, l’absence de ce qu’est Dieu et – nous le savons – Dieu est Amour. Voilà, le péché, c’est lorsque l’amour n’est pas là. Cet acte de la volonté, aimer, c’est vouloir, le bon, le meilleur, pour celui qui est là, près de moi, ou un peu plus loin, ou encore un peu loin… C’est vouloir le bien de celui qui est, aujourd’hui, mon prochain. L’amour, c’est fatigant. Normalement, quand on a bien aimé pendant une journée, on se couche le soir épuisé…
II – Le péché, aveuglement et mort
Et pourtant c’est la seule chose qui nous comble, c’est la seule chose qui nous rend vraiment vivants. Donc, mourir, c’est ne pas aimer. Donc, c’est bien le péché qui est la cause de la mort, de la mort spirituelle évidemment. Mais, il y a une comparaison possible entre la mort physique et la mort spirituelle. Vous savez, quand quelqu’un est mort, ou se rapproche de la mort, c’est sa capacité de relation qui est blessée. Peu à peu, il se retrouve un peu isolé dans son corps jusqu’au moment où il n’a plus de relation, la mort est là. Eh bien, on peut avoir des gens en très bonne santé dont le corps va très bien, mais le cœur est mort déjà. C’est ça, le péché. Alors, il est souvent facile de regarder l’autre et se dire : ‘lui, il est déjà mort de l’intérieur’. Les jugements hâtifs, attention. Et puis, on peut se regarder soi-même et se rendre compte que, parfois, on est comme enfermé en nous-mêmes. Nous sommes incapables d’être vraiment vivants. Et Jésus nous appelle à une conversion dans ce cadre-là. Si nous avons une poutre à l’intérieur, dans l’œil, si nous sommes morts dans ce cadre-là, il faut commencer par retrouver la vie, il faut retrouver la capacité d’y voir clair. Moi, ma tentation, parce que j’ai ce texte, « qu’as-tu à regarder la poutre qui est l’œil de ton frère alors que la tienne, tu ne la remarques pas ». Mon premier réflexe est de regarder ce personnage fictif qui est là, mais qui est l’un de vous peut-être, en me disant : ‘lui, il a quand même une poutre pour ne pas voir sa poutre !’ Mais, justement, Jésus me parle de moi tout comme Il parle de vous. C’est moi qui ai une poutre dans l’œil. Il ne me demande pas de traiter la poutre de mon voisin, d’autant plus que ce n’est peut-être pas une poutre car je n’ai pas la vue claire. Jésus nous appelle à nous regarder nous-mêmes, à ouvrir les yeux sur ce que nous sommes. Nous sommes des perles merveilleuses que Dieu aime mais qui sommes bien souvent à côté. D’ailleurs, le mot en grec « hamartia » qui veut dire « péché », c’est ce qui manque la cible. La cible c’est la joie, c’est le bonheur, c’est la vie. Et le péché c’est ce qui passe à côté.
III – Le péché, contre la Paix
Le péché est très lié à la mort mais aussi à la paix. C’est d’ailleurs très intéressant de regarder la liturgie de la messe. Tout au long de cette dernière, plusieurs fois, on parle de la paix. Alors, quand c’est un évêque qui célèbre, il commence en disant : « La paix soit avec vous ». Et juste après, nous faisons la confession des péchés. Au milieu de la prière eucharistique, on demande au Seigneur de nous donner cette paix, et, juste après on Lui demande de nous libérer du péché. Juste après le Notre Père, dans l’embolisme, « délivre-nous de tout mal, Seigneur, et donne la paix à notre temps que nous soyons libérés du péché ». C’est lié. Le plus grand ennemi de la paix c’est mon péché. « Je vous laisse la paix, Je vous donne Ma paix, ne regarde pas nos péchés », encore. Quand que je n’ai pas pris conscience que le plus ennemi de la paix, c’est moi, rien ne changera. Parce que la seule personne sur qui je peux avoir une vraie influence, c’est moi-même. Je ne peux pas convertir l’autre, je ne peux pas changer son cœur, je ne peux pas le forcer à faire la paix. Par contre, moi, je peux me forcer à aimer, à choisir d’aimer.
Alors, cela nous jette immédiatement dans l’actualité. Oui, nous, chacun dans notre vie, avons à mener une guerre contre le péché, contre nos tentations, l’égoïsme, le repli sur même, la médisance, la calomnie, et – vous le savez – on en est capable et on le fait ! Je le fais aussi. Tous ces moments où je me sers, alors que le chemin du bonheur et de la joie c’est de se mettre au service du frère. Alors, nous pleurons aujourd’hui parce qu’en Europe, il y a la guerre. Alors j’ai entendu dire que cela faisait 70 ans qu’il n’y avait pas eu la guerre. Alors, ceux-là ont la mémoire un peu courte, cela fait huit ans qu’il y a la guerre dans le Dombass, cela fait vingt ans nous étions en guerre au Kosovo, il y a trente ans, nous étions en guerre en Bosnie.
Mais, nous pleurons ! Parce que la guerre n’est pas une solution, c’est un cercle vicieux qui entraîne la violence, la pauvreté, la détresse. Et, puis, ensuite, on retourne dans un autre cycle car ceux qui ont connu ça, petits, vont entrer dans ce même cycle. Celui qui a connu ça, petit, ne connaît que la violence et n’est capable de donner que la violence. En fait, si vous élevez un chien en lui tapant dessus, il devient hargneux et méchant. C’est pareil pour les hommes. C’est terrible…
Solution : ma conversion !
Alors, nous avons, d’abord, nous à nous convertir, c’est là le premier combat, et puis, nous avons à prier Dieu parce que c’est Lui qui est le seul à pouvoir éclairer nos cœurs, donc mon cœur, dans mon combat personnel contre le péché, contre moi-même, et puis le cœur de ceux qui nous entourent, des dirigeants qui ont des responsabilités qui, aujourd’hui, nous conduisent à la guerre. Mais la guerre, il faut être deux pour faire la guerre, au moins. Alors, nous prions pour eux, pour ces dirigeants, tous ceux qui ont une responsabilité. Et nous nous faisons connaître notre avis. C’est politique comme discours, n’est-ce pas ? Mais nous sommes chrétiens, nous sommes engagés dans ce monde, qui est le nôtre. Et nous savons une chose, c’est que la guerre s’oppose exactement au projet de Dieu.
Alors, c’est une situation un petit peu sombre. On a parlé du péché, qui conduit à la mort, et qui est lié à l’absence de la paix. On pourrait se dire : ‘c’est foutu’. Mais nous avons cette parole de saint Paul : « Rendons grâce à Dieu qui donne la victoire par notre Seigneur Jésus-Christ ». Ça, c’est étonnant : le Christ a déjà gagné ! Comment a-t-il fait ? Non pas en envoyant Ses légions d’anges, non pas en réunissant Ses disciples pour les organiser en armée. Non ! En choisissant de donner Sa vie, de La donner à des gens qui ne la méritaient pas à l’époque et ni aujourd’hui. Nous ne méritons pas l’amour et la tendresse de Dieu, mais nous sommes invités à ouvrir notre cœur et à L’accueillir. Profitons, accueillons ce cadeau. Dieu a déjà gagné, le Christ a donné Sa vie, et ce don-là n’est pas perdu.
Alors, je conclus juste avec les mots de saint Paul. « Frères et sœurs, soyez fermes, soyez inébranlables, prenez une part toujours plus active à l’Œuvre du Seigneur. » Prenez une part toujours plus active à l’Œuvre du Seigneur… Ce que veut le Seigneur c’est que nous soyons Ses coopérateurs, que l’amour triomphe dans notre monde, que l’amour triomphe dans notre pays, dans notre commune, dans notre association, dans notre paroisse, dans notre famille. Que l’amour triomphe dans mon cœur. Vous le savez, dans le Seigneur, la peine que vous vous donnez n’est pas perdue car Jésus est vivant !