Homélie de la Solennité de l’Epiphanie,
le dimanche 2 janvier 2022, par l’abbé Gaël de Breuvand
I – Manifestation du Christ
Aujourd’hui, « épiphanie » : c’est un mot assez large : ce qui fait « phanie », c’est ce qui se manifeste, ce qui se déploie, ce qui se montre ; et « épi », c’est ce qui se déploie à l’extérieur, au monde. Quand on parle d’ « épiphanie » dans l’Évangile, on pense à trois moments qui sont épiphanie : on parle de l’Épiphanie aux Mages, c’est elle qui a gardé le nom propre ; et on parle d’épiphanie pour le Baptême de Jésus ; ce jour-là, ce qu’est Jésus a été manifesté : Fils du Père, aimé du Père, envoyé du Père ; et puis, il a été aussi manifesté, il y a aussi une « épiphanie » aux apôtres, au jour des Noces de Cana. Ce jour-là, ils ont reconnu un Messie, un envoyé de Dieu.
Alors pourquoi toutes ces épiphanies, pourquoi toutes ces manifestations ? Pour que nous puissions poser un acte de foi. Je pense que vous êtes d’accord avec moi : un petit enfant dans une crèche, ça n’a rien de très extraordinaire, dans une maison, car a priori, à ce moment-là Jésus est un peu plus âgé, ils ont quitté l’étable et ils sont dans une maison. Un petit enfant, entre un papa et une maman, ça n’a rien d’extraordinaire. Et il faut que les Mages posent ces actes un peu étonnants, ces cadeaux, pour que nous découvrions un peu mieux qui est Jésus.
Vous les connaissez, les trois cadeaux : l’or, c’est le cadeau que l’on fait aux rois, car Jésus est roi, descendant de David – oui, mais il y en a plein d’autres, des descendants de David, mais Il est roi parce que Dieu l’a choisi pour être au service de Son peuple, parce que – vous le savez – c’est ça, être roi. L’encens, c’est cette fumée qui monte vers le ciel, qui nous pollue un peu, mais qui sent bon et qui est un acte qui manifeste l’adoration. On n’encense que Dieu, véritablement acte d’adoration, signe de notre prière qui monte vers le ciel. Et puis, le dernier cadeau, la myrrhe, ce qui désigne que Jésus est pleinement homme. Il va mourir, et il faudra l’embaumer ; et avec cette myrrhe, ce parfum, on va pouvoir prendre soin de Son corps en son temps. Et ces Mages qui reconnaissent en Jésus un homme – ça n’était pas encore très difficile – qui reconnaissent en Lui un roi, qui reconnaissent en Lui Dieu, nous permettent de faire cette même démarche.
II – Adoration des mages
Oui, nous voulons reconnaître en Jésus un homme, donc notre frère ; nous voulons reconnaître un roi, quelqu’un qui est à la fois à notre service mais auquel nous sommes invités à nous mettre à Son service et à servir avec Lui ; et nous sommes invités à reconnaître notre Dieu et à faire comme les Mages, lui offrir notre encens. Et vous le savez bien, l’encens matériel, ce n’est pas ce qui est essentiel : ce qui compte essentiellement, c’est l’offrande de notre cœur. Il n’y a qu’à Dieu que l’on peut donner complètement, entièrement, pleinement, notre cœur, et c’est là l’acte d’adoration véritable. Alors, l’or, l’encens la myrrhe, nos positions physiques, vont nous aider à entrer dans cette démarche d’adoration. C’est un beau mot, « adoration » : « ad » en latin c’est s’approcher, et « os » c’est la bouche. En fait, quand j’adore, j’envoie un baiser de ma bouche vers celui que je veux adorer. Je lui donne mon souffle, je lui donne ce que je suis. Et les Mages, quand ils adorent, ils se prosternent. Se prosterner, c’est se mettre à genoux, c’est se faire tout petit, devant ce tout petit enfant qui n’a rien d’extraordinaire. Ils le reconnaissent comme plus grand qu’eux, et ils se font tout petits, et ils viennent toucher le sol de leurs fronts, certainement. Quand Jésus se manifeste, voilà ce que font les Mages, et voilà ce que nous sommes invités à faire. Et quelle chance nous avons, parce qu’aujourd’hui encore nous pouvons vivre cela, nous pouvons entrer dans cette adoration véritable, cette prosternation profonde. Celle dont Jésus parle à la Samaritaine : « le Père cherche des adorateurs, en esprit et en vérité », Il cherche ceux qui accepteront de se reconnaître tout petits, de se laisser aimer et sauver.
Et dans quelques instants, sur cet autel, sous cette très humble apparence d’un tout petit morceau de pain, même pas très bon, Jésus vient. Lui, l’Homme, le Roi, notre Dieu.
III – Le Salut est donné par les juifs
Alors, en ce jour d’Épiphanie, nous voyons les nations, les Mages qui viennent d’Orient, qui ont reconnu, grâce à leur science, en écoutant aussi, et surtout au fond de leurs cœurs, ils ont reconnu qu’il y avait quelque chose d’étonnant, et ils se sont approchés de la Terre Sainte, cette Terre promise ; mais comme ils ne savaient pas aller jusqu’au bout du voyage par eux-mêmes, il leur a fallu s’arrêter à Jérusalem et se mettre à l’écoute de la révélation biblique, de la révélation aux Juifs. On ne peut pas entrer dans le mystère du Christ sans passer par la Bible, sans passer par la révélation aux Juifs, sans passer par le peuple hébreu, le peuple d’Israël. Donc, ils se sont approchés, ils ont appris, ils se remis en marche et ils sont arrivés, avec une grande joie, à la maison où Jésus était. Et, là, ils ont apporté leurs cadeaux ; mais, en réalité, ce qu’il s’est passé, c’est qu’ils ont été remplis de l’amour de Dieu, et ils vont pouvoir repartir chez eux. Et nous pouvons être certains que chez eux ils ont témoigné.
C’est, là encore, le cœur de notre démarche spirituelle. Nous voulons nous approcher de Jésus qui se manifeste dans Sa parole, dans Ses sacrements et nous sommes invités à repartir pour apporter ce Jésus, cette joie de Dieu, au monde qui nous entoure. C’est la mécanique du cœur. Le cœur se dilate, le sang est aspiré, il reçoit l’oxygène, et le cœur se contracte et envoie le sang dans tous les membres du corps. Nous sommes invités à être le sang de notre monde. Recevoir l’oxygène qui est la Parole de Dieu, qui est la vie de Dieu, pour pouvoir la transmettre, la porter, à tous les membres du corps, à tous les membres de notre famille humaine. Nous sommes invités à être des témoins.
En cette fête de l’Épiphanie, c’est ce que je nous souhaite peut-être pour l’année 2022 : qu’elle soit une excellente année pour que nous soyons pleinement remplis de l’amour de Dieu ; que nous soyons capables de le porter à tous les hommes que nous rencontrerons ; que nous aimions, et que nous nous laissions aimer.