Jr 23,1-6 ; ps 22 ; Ep 2, 13-18 ; Mc 6, 30-34
Homélie du 16e dimanche du Temps ordinaire, Année B, 18 juillet 2021
par l’abbé Gaël de Breuvand
Il s’agit de la transcription d’une prédication orale. Les titres sont ajoutés après transcription.
I – Jésus bon berger
La première lecture qui nous est donnée aujourd’hui provient du livre de Jérémie et il fait face à un constat terrible : ceux qui ont la responsabilité du peuple ne font pas leur travail. Les bergers ne prennent pas soin des brebis. « Quel malheur pour vous, pasteurs ! » nous sommes en 600 av. J.-C. et dans quelques années, Jérusalem tombera, entre les mains des envahisseurs. Jérusalem sera détruite. Alors Jérémie aurait pu désespérer. Le peuple aurait pu désespérer : « Nous sommes perdus ». Mais voilà la promesse de Dieu : « Un jour viendra où je susciterai de David, un germe juste, une descendance. Et lui, il sera le vrai roi, le vrai berger, celui qui prendra soin de nous ».
600 ans plus tard, nous sommes toujours en Israël, avec Jésus. Et Jésus agit pour nous comme ce vrai roi, ce berger qui veut prendre soin de nous. En premier lieu, il veut prendre soin de ses disciples. « Venez à l’écart dans un endroit désert et reposez-vous un peu ». Oui, il fallait peut-être éviter aux disciples et aux apôtres le burn-out. Il faut savoir s’arrêter pour reprendre des forces. Et quand la foule vient et qu’elle est comme assoiffée, désireuse d’être nourrie, voilà que Jésus est saisi de compassion envers eux. C’est un terme fort. En fait, ses entrailles se tordent. Tout son corps est touché par la soif et la faim de toutes ces personnes. « Ils étaient comme des brebis sans berger ». Et vous remarquerez la première chose que fait Jésus : « Il se mit à les enseigner longuement ».
II – se reposer pour travailler ? ou travailler pour contempler ?
Du coup, c’est l’occasion de réfléchir à ce qu’est pour nous le repos. Il y a deux lectures du repos. La première lecture est la lecture très humaine, très pratique, un peu commerciale : j’ai besoin de me reposer pour pouvoir travailler. Oui, c’est vrai. Et de fait, Jésus donne à ses disciples la possibilité de se mettre à l’écart et de se reposer aussi pour pouvoir repartir ensuite plein de force et d’enthousiasme. Mais cela n’est qu’une lecture humaine.
Lorsqu’on lit avec un peu d’attention la Bible, on constate que Dieu a travaillé pendant six jours pour la création et qu’à la fin des six jours, le seigneur Dieu se reposa parce que la Création était en achèvement. C’est très intéressant, parce que le mot « se reposer » en hébreu est un mot un peu ambigu : On peut également le traduire ou l’entendre par « Il contempla ». « Et Il vit que cela était bon, même très bon ». Quand Jésus emmène ses disciples à l’écart, ce n’est pas simplement parce qu’ils sont fatigués, c’est aussi pour leur permettre de prendre un peu de recul, de se retourner sur ce qui vient d’être accompli, pouvoir rendre grâce.
Jésus invite ses disciples à vivre l’expérience du peintre : Le peintre qui est pris de folie créatrice… Il a réalisé son tableau, et la pression retombe… Le tableau est fini, le peintre fait un pas de recul et contemple son œuvre tout entière. Il rend grâce ! Puis ensuite, il signe. C’est ce que fait Dieu dans son acte de Création ; Il contemple l’œuvre qu’il a faite. Et il l’aime. C’est ce que les disciples sont invités à faire. Ils sont invités à se mettre à l’écart pour pouvoir contempler et rendre grâce. Et cela change tout. Entre la première vision de ce qu’est le repos pour mieux travailler et la vision de Jésus, il y a un monde. Car lorsque Jésus nous invite à nous reposer, Il nous invite à travailler pour le repos, pour la contemplation.
Très concrètement, pour nous, le dimanche, est-ce d’abord la période de repos pour pouvoir vivre notre semaine ? Non. C’est notre semaine qui est faite pour préparer notre dimanche. En fait, quand nous nous arrêtons le dimanche, nous avons besoin de nous retourner sur la semaine qui vient de passer pour pouvoir dire : « Seigneur, merci ! » Merci de telles rencontres, merci de m’avoir permis d’être un relais de ton Amour, merci de telles réalisations… Et pendant ma semaine, je vais pouvoir préparer ce que j’ai à dire au bon Dieu dimanche prochain. Notre semaine est invitée à être ordonnée au dimanche, pas l’inverse. Parce que la contemplation, c’est vraiment cela l’œuvre humaine. Un chat et un moustique ne s’arrêtent pas pour contempler. Les animaux, Quels qu’ils soient, font leur boulot. Ils ne s’arrêtent pas pour pouvoir dire, « Ah, ça c’est beau ! Merci Seigneur ». Cela est une caractéristique propre à notre humanité.
III – Contempler, une manière d’aimer
Cette contemplation, ce repos, ne nous interdit évidemment pas de répondre aux appels qui sont faits. Ce n’est pas parce que j’ai travaillé à me mettre au service des pauvres tout au long de la semaine que le dimanche je dois me l’interdire. Nous essayons de ne pas tomber dans le péché des pharisiens : À croire que la lettre de la loi prime sur l’amour. Nous sommes bien d’accord : contempler l’œuvre réalisée, la création de Dieu, réaliser les merveilles que Dieu accomplit par mon intermédiaire, moi serviteur inutile. Cette contemplation-là est finalement une manifestation, un déploiement du grand commandement : aimer. Et nous le savons, aucune manière d’aimer ne s’oppose aux autres.
Voilà nous sommes dimanche aujourd’hui, c’est l’occasion de recueillir ce que nous avons vécu cette semaine et d’en faire un bouquet, de le présenter à Dieu en sachant rendre grâce à Dieu pour toutes ces merveilles en sachant accueillir la grâce, l’amour qu’Il veut nous donner pour que nous puissions le déployer tout au long de cette semaine.