Homélie du 20e dimanche du Temps Ordinaire, Année A, 16 août 2020
Par l’abbé Gaël de Breuvand
Il s’agit de la transcription d’une prédication orale. Les titres sont ajoutés après transcription.
Is 56, 1.6-7
Ps 66
Rm 11, 13-15.29-32
Mt Mt 15, 21-28
I – Dieu bénit
Nous avons entendu le psaume 6, un psaume de bénédiction. « Que Dieu nous prenne en grâce et nous bénisse ». Voilà le cri du peuple d’Israël vers son Dieu, vers notre Dieu. Un jour, il y a eu une rencontre entre un malade à l’hôpital et le visité. Et le prêtre a dit au malade : « Que Dieu vous bénisse ! » Et le malade a répondu : « Mais Dieu ne sait pas faire autre chose ». Il avait raison. Dieu ne sait pas faire autre chose que bénir. En latin, c’est benedicere, ce qui veut dire : « dire du bien ». Dieu bénit. Et toute l’histoire du monde est une histoire de bénédiction. Dieu bénit Adam et Eve, et Il leur donne de se multiplier. Dieu bénit Abraham, et Dieu bénit le peuple d’Israël. Il bénit : pour le bien, la joie de celui qu’Il bénit. Mais pas seulement.
II – Une bénédiction pour tous
La première lecture du livre d’Isaïe est un texte relativement tardif. Autrement dit, il a été composé après le retour d’exil, entre 587 et 537. Le peule est rentré. Oui, il se sent béni. Car il retrouve son temple, il retrouve sa terre. La promesse de Dieu est toujours valide. Et lorsqu’il arrive dans son pays, le peuple voit que pendant ses cinquante ans d’absence, d’autres se sont installés. Histoire on ne peut plus classique. Et la grande question est : « est-ce que ces gens-là ont le droit de cité parmi nous ? » Il y a une complexité de plus, c’est que ces gens-là, ces étrangers qui se sont installés en Terre promise, ils se sont mis à croire en Dieu. Mais ils sont étrangers. Alors il y a un conflit au sein du peuple, entre ceux qui disent : « non, ce qui compte, c’est d’être des descendants de Juifs, descendants d’Israël, avoir été en exil… » et ceux qui disent… Et voilà ce que Dieu répond dans cette première lecture. Ce qui compte : « observer le droit, pratiquer la justice, les étrangers qui ses ont attachés au Seigneur, accueillez-les ! ». Ils ont à devenir les serviteurs de Dieu, à observer le sabbat sans le profaner, ils ont à tenir l’Alliance. Eux aussi, ils sont accueillis. Ils sont bénis par Dieu.
Ce conflit entre une forme d’exclusivité : « La bénédiction, elle est pour nous, elle n’est pas pour les autres ». Et cet appel à l’universalité : la bénédiction est destinée à tous. C’est là que l’on réfléchit sur la raison d’être d’Israël. Et c’est ce que développe saint Paul dans la lettre aux Romains.
Pourquoi Israël ? Pourquoi ce peuple choisi, ce tout petit peuple choisi, à quoi sert-il ? Et finalement, c’est Dieu qui, déjà, répondait, le jour où il a appelé Abraham. « Je te comblerai de ma bénédiction et par toi, toutes les familles des peuples se béniront ». Abraham, et tout le peuple d’Israël à sa suite, pour être bénédiction pour les autres. En fait, ils sont là pour être les transmetteurs de la bénédiction de Dieu. Ils sont là pour être des témoins des merveilles que Dieu fait pour eux. En être témoin et en ajoutant : « Pour vous aussi, le Seigneur peut faire cela ! » C’est toute l’Histoire sainte, c’est toute la vie spirituelle.
C’est cette petite Bernadette de Lourdes, – hier, c’était le 15 août, c’était la grande fête à Lourdes, comme partout en France -, qui a reçu un appel et une bénédiction toute particulière. Elle est vraiment bénie de Dieu. Mais ce n’est pas pour elle seule ; c’est pour qu’elle le transmette. Vous vous rappelez ? « Je ne suis pas là pour vous y faire croire, je suis là pour vous le dire ».
III – Jésus bénit aussi
Du coup, on arrive à l’évangile. J’ai l’impression qu’il est presque en contradiction avec ce que je viens de dire. Jésus est dans un pays païen, Sidon et Tyr, interpellé par une païenne. Et il ne répond pas ! Et non seulement Il ne répond pas mais en plus les disciples sont là et disent : « Fais-là taire ! Elle est insupportable. » Et Jésus leur dit et confirme : « Je ne suis pas venu pour elle, ni pour les païens. Je suis venu pour les enfants, les brebis perdues d’Israël ». Et donc quand on lit cela, on se dit – exclusivité ! – seuls les Juifs ont droit au Messie. En fait, la réponse nous est déjà donnée dans ce texte. Il y a besoin de deux choses. Ces deux choses, c’est d’abord l’appel de Dieu. Et l’appel de Dieu il est pour tout homme : la foi que manifeste la syro-phénicienne, c’est déjà un cadeau de Dieu. Le Père, l’Esprit Saint, a répondu et a donné la foi à cette femme ; et elle peut se tourner vers le Christ et lui dire : « Viens à mon secours ! » Et Jésus reconnaît cette foi. Il l’entend.
Et puis, c’est toute l’Histoire du Nouveau Testament et en particulier des Actes des apôtres, c’est que le Seigneur Dieu a choisi d’avoir besoin de nous. Jésus est venu enseigner aux enfants d’Israël. Et un certain nombre d’enfants d’Israël ont cru. Vous connaissez leurs noms : Pierre et Paul, André, Jacques et Jean, Thomas, Jacques et Philippe, Barthélémy et Matthieu, Simon et Jude. Et puis des femmes aussi : Marie, mère de Jésus, Marie, femme de Cléophas, Marie de Magdala et quelques autres, Marthe. Ils ont été des témoins. Ils ont reçu la bénédiction. Ils ont accueilli le Messie dans leur vie. Ils ont accueilli l’Amour et ils ont voulu en témoigner et porter cet Amour à tous ceux qui étaient autour d’eux. Parce qu’ils étaient douze au départ et aujourd’hui, nous sommes deux milliards ! Alors rendons grâce pour cela.
Mais c’est aussi un appel pour nous. Nous sommes, – majoritairement, je pense, dans cette église -, baptisés, donc nous avons été bénis, Dieu a dit une parole de bénédiction sur chacun de nous. Pour quoi faire ? Pour que nous la gardions pour nous ? En posant la question j’y réponds : bien évidemment, non ! Il nous faut en témoigner. Transmettre cet Amour que nous avons reçu. Nous sommes, – ouh là ! -, au moins 50 dans l’église et il y a à peu près 12 300 personnes qui sont en dehors de l’église… Qui leur dira que Dieu les bénit ?
Demandons au Seigneur de faire grandir notre foi, de faire grandir notre espérance, de faire grandir notre charité, cet amour-même de Dieu. Au cours de la messe, c’est Dieu Lui-même qui vient habiter en nous. Oui, c’est là la bénédiction parfaite. Et à la fin de la messe, nous allons entendre cette parole : « Allez dans la paix du Christ ! » Et je vous l’ai déjà dit. C’est une très mauvaise traduction. En latin, c’est Ite missa est, et cela ne veut pas dire que la messe est finie. Cela veut dire : « Allez ! vous êtes envoyés ». Envoyés par qui ? Par celui qui vous bénit ! Dieu Père, et Fils, et Saint-Esprit, Dieu Amour. Et vous êtes envoyés pour quoi ? pour porter cet Amour, pour porter cette paix, pour porter cette joie ! Et nous sommes envoyés à qui ? A tous ceux que nous rencontrerons, membres de la communauté, mais aussi à tous les autres, qui sont tous des enfants de Dieu, appelés par Lui à l’aimer et à se laisser aimer et ainsi trouver la vraie joie.