Les sources de l’écologie chrétienne : homélie du 15e dimanche de TO – A

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Par l’abbé Gaël de Breuvand,

La vallée d’Yzréel, vue du mont Carmel, en Terre Sainte

Homélie du 15e dimanche du Temps ordinaire, Année A, 12 juillet 2020

1ere lecture : Is 55, 10-11
ps 64
2e lecture : Rm 8
évangile : Mt 13, 1-24

C’est une bonne tranche de la Parole de Dieu que nous avons reçue aujourd’hui, et c’est un texte que l’on connaît par cœur, et, non seulement on le connaît par cœur, mais en plus Jésus nous en donne l’explication. Donc, on va parler des autres textes… Et en particulier la deuxième Lecture. Souvent, le dimanche, c’est le texte que l’on oublie parce que le lien n’est pas immédiat avec l’Évangile et la Première lecture… Et pourtant ! Saint Paul, aujourd’hui, nous apporte quelque chose d’essentiel : ce qu’il nous dévoile, c’est finalement l’histoire de notre monde, le sens de notre monde.

I – le projet de Dieu : un monde de relation

Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre. Il créa l’homme, à la fin ; et tout cela, c’est un acte de Dieu, par amour. On le sait, Dieu est amour, on en a parlé dimanche dernier, on en a parlé pour la Sainte Trinité, on en parle tout le temps. Dieu est amour, et Il crée par amour, pour nous donner Sa joie. Et le monde qu’il le crée est un monde qui est dans l’ordre, et le lien qui fait que ce monde est UNE création, UN univers, UN cosmos, c’est qu’il y a une relation entre tous les éléments de ce monde. Il y a des relations de nécessité : la terre qui tourne autour du soleil, la pesanteur, l’eau qui mouille… ce ne sont pas des relations très intéressantes ; et puis on monte dans la création : on découvre qu’il y a des relations qui deviennent plus importantes, comme la relation des microbes, qui est encore toute petite, et puis la relation des plantes et des animaux, et enfin la relation dont nous sommes capables, nous, les hommes, parce que nous sommes créés pleinement à l’image de Dieu. Nous sommes capables d’amour, et on dira que cette relation est une relation de liberté. On parlait des relations de nécessité, mais celle-là, cet amour que nous sommes capables de donner et de recevoir, c’est une relation de liberté. Et Dieu nous fait cadeau de cette relation, de cet amour. Il nous rend capables d’aimer ; ou de ne pas aimer. Vous le savez, c’est au chapitre 3 de la Genèse, le récit de la chute. « Qu’est-ce que c’est ? » Eh bien, l’homme met en jeu sa liberté, et il fait le choix de blesser gravement la relation qui l’unit à son Créateur : « j’ai eu peur, je me suis caché », la relation qui l’unit à son épouse et réciproquement, « ce n’est pas moi, c’est la femme que Tu m’as donnée », et cela blesse la relation avec la Création toute entière, « ce n’est pas moi, c’est le serpent qui m’a dit », et d’une certaine manière, on pourrait dire que c’est aussi à cause de l’arbre, qui n’avait pas à être là !

II – le Salut de Dieu : rétablir la relation

Et depuis, il y a une sorte de déséquilibre dans la Création : il devrait y avoir des relations toujours sereines, paisibles, ordonnées, et voilà que, on le constate tous les jours, c’est plutôt une relation conflictuelle, qui nous sépare, finalement. Et saint Paul le dit « la création a été soumise au pouvoir du néant, non pas de son plein gré ». Elle a gardé l’espérance d’une libération ; Dieu ne se satisfait pas de nous voir dans cette situation de manque d’amour. Alors, Il veut nous redonner la capacité d’aimer. Et Il envoie sa Parole, Il s’approche d’Abraham, d’Isaac, de Jacob, de Moïse, de tous les prophètes, des rois d’Israël, Il s’approche de ce peuple pour dire « Je veux être en relation d’amour avec toi » et Il donne ces deux grands commandements, qui n’en font plus qu’un : si tu veux trouver la joie et le bonheur, si tu veux remettre les choses dans l’ordre : « Écoute, écoute Israël, le Seigneur ton Dieu est l’unique, tu l’aimeras de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit, et tu aimeras ton prochain comme toi-même. » Il s’agit d’aimer, et de se laisser aimer. Alors, c’est un peu compliqué, et la Création continue de gémir dans les douleurs de l’enfantement. C’est assez parlant, ça ne vient, ça fait pourtant longtemps qu’on sait ce qu’il faudrait faire ! Et on ne le fait pas… Dieu a donné Sa Parole, on l’a entendu dans le prophète Isaïe, une Parole qui est efficace au même titre que la pluie : quand elle tombe, elle mouille. Cette Parole nous est donnée pour nous sauver, mais Dieu n’a pas choisi de faire table rase de la Création, Il ne supprime pas la nature, Il l’élève, Il la sauve, et donc Il nous donne toujours la capacité d’aimer. Et cette capacité d’aimer implique notre liberté. Alors, en ces temps qui sont les derniers, Dieu est venu lui-même : Jésus est La Parole. Il est le Verbe. Vous savez, un verbe dans une phrase, c’est ce qui donne le sens de la phrase : vous enlevez le verbe et on ne comprend plus rien. Jésus est le Verbe, le sens de notre monde.

III – Laisser grandir la Parole

Il nous montre, par Son exemple, par Sa Parole, par Son être même, que la seule solution, c’est de se laisser aimer et d’aimer. Il nous sauve en nous laissant ce grand commandement « Aimez-vous les uns les autres comme Moi je vous ai aimés ». Alors, cette Parole là nous la recevons, elle nous est lancée par le Seigneur comme une semence, et nous la recevons. Vous le savez, une semence, quand elle arrive, elle arrive en terre et on ne la voit pas trop ; Et puis, il y aura peut-être des jours, des semaines de silence, on a l’impression que rien ne s’accomplit ; et pourtant, cette semence pousse toute petite pousse verte, puis elle grandit, puis ensuite elle donne du fruit. De fait, cette Parole, nous la recevons. Bon, depuis pas très longtemps pour les petits qui sont là, mais peut-être parmi nous il y en a qui la reçoivent depuis 40 ans, 50 ans, 70 ans, et on n’a pas l’impression que ce soit très efficace ! Je parle en me regardant moi-même… Et pourtant le Seigneur sauve, et Sa Parole est efficace, et elle porte du fruit. Le Seigneur nous aime et Il veut nous donner la capacité d’aimer, et donc Il nous laisse la liberté. Et c’est nous qui pouvons choisir quelle terre nous serons. Est-ce que nous serons un sol sec, un sol envahi par les ronces, ou bien une bonne terre ?

Et je termine avec ce terme de « bonne terre ». En latin, la terre fertile, cela se dit « humus ». « Humus », ça a donné un autre mot en français : « humilité ». Jésus nous dévoile que le chemin du bonheur, de la vraie joie, c’est l’humilité. Et, concrètement, qu’est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire être capable de recevoir ; recevoir Dieu parce qu’il me comble, recevoir l’autre car il a toujours quelque chose à m’apporter. « Recevoir » : c’est cela la clé : accueillir. C’est ce que nous faisons en écoutant la Parole de Dieu, c’est ce que nous faisons en recevant l’Eucharistie, c’est ce que nous faisons lorsque nous nous rencontrons les uns les autres. Il y a toujours un combat, le même depuis toute éternité, depuis qu’Adam et Ève dans le jardin se sont dit ; « non je vais plutôt prendre mon chemin à moi, plutôt que prendre celui de Dieu ». Alors, aujourd’hui, pour cet été qui commence, ces vacances scolaires, choisissons de nous mettre en vérité, à l’écoute : écoute de la Parole de Dieu – cela veut très concrètement d’ouvrir son évangile – écoute de nos proches, de ceux qui vivent avec nous, reprendre, à nouveaux frais, cette démarche d’écoute dans tout ce qu’il est. Le chemin du bonheur et de la joie – pas de nouveauté ! – c’est toujours de se laisser aimer et d’aimer en retour.