Les textes qui nous sont donnés aujourd’hui ne semblent pas avoir grand’ chose de commun entre eux. C’est un petit peu difficile de percevoir leur lien. Bon, on peut quand même rapprocher le fait que Jérémie est insulté, calomnié, avec le début de l’Évangile : « Ne craignez pas les hommes, ne craignez pas ceux qui tuent le corps » Voilà, Jésus nous le dit, la persécution nous est promise. « Heureux êtes-vous si l’on vous persécute à cause de moi » Il nous l’avait déjà dit. On peut aussi rapprocher la Deuxième Lecture avec l’Évangile. Parce que « quiconque se déclarera pour Moi devant les hommes, Moi aussi je me déclarerai pour lui devant Mon Père qui est aux cieux ». Cela, nous l’entendons bien. Et puis la phrase suivante qui est un peu plus difficile à accueillir : « Celui qui Me reniera devant les hommes, Moi aussi Je le renierai devant Mon Père qui est aux cieux » C’est une parole dure. Et, de fait, vous les savez, il y a bien une chose qu’il ne faut jamais faire quand on étudie la Parole de Dieu, c’est de prendre une phrase hors contexte et de l’ériger comme une vérité absolue. Parce que la Bible, c’est une Parole de Dieu écrite dans son ensemble, écrite sur plus de 1000 ans, qui fait 2000 pages, c’est un ensemble pédagogique qui nous dévoile peu à peu qui est Dieu. Et il faut avoir du coup un rapport qu’on appelle la lecture canonique, donc un rapport bien particulier aux Écritures, qui nous permet de mettre en dialogue les différents textes, les différentes paroles de Dieu. Et c’est seulement à l’issue de ce dialogue entre les textes que l’on peut toucher à la vérité de la Parole de Dieu. Et cette vérité, elle a été confiée par le Christ à ses disciples, à ses apôtres. Et ces disciples et ces apôtres ont été chargés de nous la transmettre. Et c’est aujourd’hui l’Église, une sainte, catholique et apostolique, qui est dépositaire de cette vérité. Il n’y a pas un homme d’Église qui aurait cette vérité, mais chacun de nous sommes gardiens de cette vérité qui nous est transmise par le Christ.
I – le péché, manque à l’Amour
Voilà, ça c’était un peu liminaire, mais du coup il va nous falloir comprendre cette Parole car elle est dite par Jésus, donc il y a quelque chose de vrai. « Celui qui me reniera devant les hommes, moi aussi je le renierai devant Mon Père qui est aux cieux » Alors cela tombe bien, car l’Église nous propose de lire cet extrait de cette lettre de saint Paul aux Romains : « Frères, nous savons que par un seul homme le péché est entré dans le monde », et là il y a un autre gros mot, un mot qu’on n’aime pas beaucoup, qui n’est pas très à la mode. « Péché », qu’est-ce que c’est que le péché ? Alors, un petit peu d’étude. ‘péché’, en grec, c’est « àmartias ». Le péché, ce n’est pas le fait de savoir si c’est la chose permise ou défendue, ce n’est pas du tout dans ce rapport-là, il y a une autre religion qui est axée sur le permis/défendu. Pour nous, chrétiens, le péché, « àmartias » en grec c’est ce qui manque la cible.
Du coup il faut réfléchir : quelle est notre cible ? Nous sommes choisis pour quoi ? Dieu nous a créés pour quoi ? Il nous a créés pour être heureux, pour être dans la joie. Alors je me tourne vers le Seigneur, et du coup le péché qui manque la cible, c’est lorsque je manque la joie, je manque le bonheur. Et la première victime du péché, c’est moi ! Alors, comment arriver à ce bonheur, comment arriver à cette joie ? Alors je me tourne vers Jésus, et je demande « Seigneur comment puis-je arriver à cette joie, à ce vrai bonheur ? » Autrement dit, quel est le plus grand commandement ? Car Dieu nous donne des commandements pour nous indiquer le chemin du bonheur… Et Jésus répond : « Écoute, Israël, écoute, le Seigneur ton Dieu est l’Unique, tu l’aimeras de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et tu aimeras ton prochain comme toi-même » On connaît par cœur, mais c’est le chemin du bonheur, et, plus loin, Jésus continue « Aimez les uns les autres comme Moi Je vous ai aimés » jusqu’à donner Ma vie pour vous, toute entière, sur la Croix. Donc nous sommes faits pour la joie et le bonheur ; ce chemin de la joie et du bonheur, nous le trouverons en aimant, et saint Paul fait allusion à cet échec au bonheur qui a commencé avec Adam.
Vous connaissez l’histoire par cœur. Cet homme, Adam, et Ève, car ils vont ensemble, ils ont entendu la Parole de Dieu qui leur a été adressée : « soyez mes amis, Je vous ai créés à Mon image, Je vous propose de vivre dans ce jardin, il n’y a qu’une chose, ne mangez pas de ce fruit-là, de cet arbre, parce que sinon, vous mourrez » Non pas comme une promesse de punition, mais plutôt, comme « Attention, si vous mettez les doigts dans la prise, cela va faire mal » Et le serpent arrive, et propose un nouveau chemin à Adam et Ève. « Oui, si tu en manges, tu seras comme Dieu. » Ce que Dieu nous avait déjà donné… Mais nous préférons prendre notre propre chemin plutôt que celui d’écouter le Seigneur… Et donc, on se sert, on mange de ce fruit, et la conséquence immédiate est que cela nous sépare l’un de l’autre : « Ils virent qu’ils étaient nus. » Et ils s’abritent, ils se cachent l’un de l’autre, et cela nous sépare de Dieu. Lorsqu’on entend le pas de Dieu dans le jardin, on s’éloigne et on part se cacher. Et puis lorsque Dieu nous demande « Où es-tu ? », on sort de là, et Il nous demande « Où étais-tu ?» « J’ai eu peur alors je me suis caché ». « Mais pourquoi as-tu eu peur ? Aurais-tu mangé de ce fruit ? » « Heu, ce n’est pas moi, c’est elle ». Voyez la rupture, voyez la conséquence immédiate du péché : j’ai manqué le bonheur, cela a blessé ma capacité de relation ; et lorsqu’Il demande à Ève « Aurais-tu mangé de fruit ? » « Non ce n’est pas moi, c’est lui », en montrant le serpent. Voyez, la relation avec la nature même est blessée. Le péché, c’est ça : c’est la blessure de la relation, un manque à l’amour, un manque à la joie et au bonheur.
II – Choisir d’aimer
Alors, le péché est dans le monde, on le constate dans notre propre vie, dans notre société, dans notre monde tout entier ; mais un nouvel homme, un nouvel Adam, est venu pour nous sauver : Jésus. Là où Adam a dit « Je vais faire selon mon propre chemin », Jésus répond « Je vais faire selon Ta volonté », là où Adam dit – en fait chacun de nous – « Je vais faire à ma manière », Jésus nous propose d’avancer sur le chemin de Dieu, sur le chemin de l’amour. Oui, si la mort a frappé la multitude à cause d’un péché, qui a blessé toute la création, combien plus, si un homme qui est Dieu lui-même aime, combien plus nous sommes sauvés par cela.
Alors, oui, « quiconque se déclarera pour moi devant les hommes, je me déclarerai pour lui devant mon Père qui est aux cieux ». C’est une parole rassurante ! Le Seigneur nous dit : ‘chaque fois que vous allez choisir d’aimer, chaque fois que vous allez choisir de faire grandir la joie et le bonheur autour de vous, alors oui, vous êtes dans le projet de Dieu, et c’est comme si c’était Moi qui parlais, comme si c’était Moi qui agissais’ ; d’ailleurs, c’est ce qu’Il fait : le Christ, chaque fois que vous choisissez d’agir dans le projet de Dieu, le Christ agit à travers vous.
III – Dieu respectueux de ma liberté
Et puis, cette Parole qui est toujours aussi dérangeante : « Celui qui me reniera devant les hommes, moi aussi je le renierai devant Mon Père qui est aux cieux. » Cela correspond un peu à la Parole qu’on a entendue il y a une semaine ou deux, qui nous disait la même idée, c’était une parole un peu dure, comme celle-là, qui nous donnait l’impression que Dieu voulait nous condamner. Or, en réalité, dans cette relation qui nous unit à Dieu, Dieu est Père, Il nous aime, Il nous a donné Jésus, nous pas pour juger le monde mais pour le sauver. La Parole que l’on a entendue la semaine dernière, c’était : « Celui qui ne croit pas est déjà jugé ». Pourquoi ? Parce que Dieu est très, très, très respectueux de notre liberté, très respectueux de notre capacité d’aimer, et c’est cela : si je choisis de me couper de Dieu, de me couper de l’amour, de me couper de la relation, Dieu continuera à m’appeler, n’ayons aucun doute, Il continuera à me séduire, Il m’appellera « Où es-tu Mon enfant, Je t’attends, viens ! » mais Il ne me forcera pas à aimer. Il ne me forcera pas à entrer dans Sa joie. C’est ce que veut dire cette phrase-là. Si je renie Dieu, si je renie l’amour, si je renie le Christ devant les hommes, alors, oui, le Christ me reniera lui aussi devant le Père, car Il ne s’imposera pas, Il ne me forcera pas à m’ajuster à Sa volonté, mais Il me le propose toujours et Il me dit « Vois, le chemin de la joie et du bonheur, ce n’est pas ce que toi tu crois, c’est ce que Moi Je te dis. » C’est le début de l’Évangile selon saint Matthieu. Jésus gravit la montagne : Il s’assit et à la foule rassemblée, Il dit « Heureux les pauvres de cœur, le royaume des cieux est à vous, heureux les doux, heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, heureux les miséricordieux. »
Alors, en conclusion, nous avons le choix : le chemin où je fais de moi le roi de toute chose, l’empereur de toutes vérités, où je pense que la seule chose qui compte, c’est mon confort jusqu’à oublier Dieu, jusqu’à oublier les autres, et là, oui c’est bien un reniement du Christ ; ou bien je choisis l’autre chemin : je choisis Dieu dans toute ma vie, je choisis l’amour et seulement l’amour, et alors je vais peut-être réussir à m’oublier moi-même. Et, face à ce chemin, je me rends bien compte que c’est un petit peu difficile, et même très difficile, car c’est chaque jour qu’il faut recommencer ce choix, hein, ceux qui sont mariés depuis peu et d’autres depuis longtemps, vous le savez bien, vous vous êtes promis de vous aimer tous les jours, tout au long de votre vie, eh bien, il y a des matins où ce n’est pas facile de se dire, tiens, aujourd’hui je vais l’aimer, celui, elle ou lui, qui est à côté de moi. C’est bien là qu’est le chemin de la joie et du bonheur, alors nous demandons la grâce, l’amour du Christ dans nos vies, c’est Lui qui, chaque dimanche, chaque jour, dans l’Eucharistie, vient nous donner Sa force, Son amour pour que nous puissions vivre de Son amour ; c’est Lui qui se donne dans le sacrement de la Réconciliation pour nous donner Sa force, pour faire de nous des témoins de Sa lumière, pour que nous puissions être des aimants.