par l’abbé Gaël de Breuvand
Dimanche 15 juin 2020
Aujourd’hui, fête du Saint Sacrement, fête de la communion. Peut-être que, parmi nous, il y en a qui préparent leur première communion, et c’est un bon jour pour réfléchir à ce que veut dire communier.
I – Faire Mémoire
Alors, justement la Première Lecture : dans le livre du Deutéronome, Moïse parle. Il commence son discours en disant « Souviens-toi, souviens-toi ». C’est quelque chose de très important dans la Bible, c’est quelque chose de très important dans toute la foi chrétienne : nous sommes appelés à nous souvenir. Et quand on se souvient, en religion, en foi chrétienne, on dit qu’on ‘fait mémoire’. Et, vous vous rappelez, pendant la prière eucharistique, on dit justement « Faisant ici mémoire de la mort et de la résurrection de Ton fils et de Son ascension dans le ciel » ; nous faisons mémoire ; en hébreu, c’est le mot « zikkaron », et ce n’est pas simplement se souvenir dans notre tête. Quand on fait mémoire en langage chrétien, par un acte de Dieu mystérieux, l’événement dont on se souvient est présent, là pour nous. Quand nous célébrons la messe, nous faisons mémoire de Jésus qui donne Sa vie : Jeudi saint, Vendredi saint, Dimanche de Pâques. Et par un mystère de Dieu, cet événement du Salut est présent pour nous. C’est comme si nous étions avec les disciples autour de Jésus, vraiment. C’est comme si nous étions avec Jean et Marie au pied de la Croix. C’est comme si Jésus nous apparaissait maintenant. Et, de fait, ce n’est pas simplement comme si, c’est effectivement ce qui arrive. Et Moïse le rappelle, nous devons faire mémoire d’une chose : c’est que Dieu a pris soin de Son peuple dans le désert, Il a pris soin de son peuple tout au long de l’Histoire d’Israël, et Il prend soin de son peuple aujourd’hui. Faire mémoire, se souvenir, mais plus que cela.
II – Transsubstantiation
Une deuxième partie : Deux semaines avant le début du confinement, c’était le Premier Dimanche de Carême, et nous avons entendu cette Parole de Jésus : l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de tout Parole qui sort de la bouche de Dieu. Et vous savez qui est la Parole de Dieu ? Jésus lui-même. Il est le Verbe. Il est Dieu tout entier, Il est Sa parole qui fait connaître Dieu. Si nous sommes invités à nous nourrir de la Parole de Dieu, nous sommes aussi invités à nous nourrir de Jésus. Et c’est bien ce qu’Il nous dit dans l’Évangile, cette chair dont Il nous parle, c’est lui-même, Sa Parole, Lui, Parole de Dieu. D’ailleurs, dans quelques instants je vais prendre un petit morceau de pain pas très impressionnant, une hostie, et je vais dire une Parole de Jésus, sur ce petit morceau de pain, et finalement ce n’est pas moi qui parle, c’est Jésus lui-même ; c’est d’ailleurs pour cela que je ne dis pas « Ceci est le Corps de Jésus », mais « Ceci est mon Corps ». Et cette Parole de Jésus, comme toutes les paroles de Jésus, est efficace. Et nous posons un acte de foi. Oui, ce pain-là n’est plus du pain, il est Corps du Christ, ce vin-là n’est plus du vin mais il est Sang du Christ. Je ne maîtrise pas bien les aspects de la question, et c’est pour cela que l’Église a choisi un mot compliqué pour dire « ah, ce qui se passe là, on ne peut pas tout à fait le comprendre. » On utilise le mot « transsubstantiation ». C’est pas mal au scrabble, c’est presqu’un peu long ! « Transsubstantiation », ce n’est plus du pain, cela veut dire que c’est le Corps de Jésus. Ce n’est plus du vin, c’est le Sang de Jésus, mais ça ressemble toujours à du pain et du vin, pour nous dire que c’est de la nourriture pour nous, que ça nous fait, comme toute nourriture, ça nous fait grandir. Alors, si on ne se nourrit que d’hostie, que du Corps du Christ, notre santé physique risque d’en pâtir, on risque de ne pas être en très bonne santé. Mais, par contre, notre cœur va grandir et nous grandirons dans ce qui est le plus important pour nous tous : l’amour.
III – Communion
Cela me permet d’arriver à la troisième partie. Quand nous mangeons la Parole du Christ, sous cette forme du pain, lorsque nous buvons le Sang du Christ, nous disons que nous communions : « communion », c’est un mot fort ! Ça veut dire que nous entrons dans une relation intime, nous entrons dans un contact proche qui unit notre corps à Son Corps, et qui unit notre cœur à Son Cœur. En fait, on parle de communion dans la vie de tous les jours, dans quelques événements bien particuliers. On parle de communion familiale pour parler du lien qui unit les membres d’une même famille. Oui, car c’est bien dans la famille de Dieu que nous entrons grâce à la communion. On parle de communion conjugale lorsqu’on parle du lien d’un homme et d’une femme qui ont choisi de se donner l’un à l’autre. Oui, car nous sommes invités à entrer dans cette intimité-là avec le Christ. En fait, une des meilleures comparaisons qu’on puisse avoir, c’est justement entre la communion au Corps du Christ et l’union conjugale. Dans un cas comme dans l’autre, le Christ donne son Corps et son Cœur et toute sa vie et, dans un cas comme dans l’autre, la deuxième personne est invitée à recevoir ce cadeau et à se donner en retour. De fait, nous le savons bien, si dans une union conjugale, je ne donne qu’un petit morceau de moi, que mon corps, eh bien ça ne va pas durer longtemps. Cela ne sera pas vrai, ce sera peut-être même quelque chose qui va défigurer l’amour. Eh bien, lorsque nous communions au Corps et au Sang du Christ, c’est exactement la même chose. Ce n’est pas seulement recevoir un symbole qui dit qu’on fait tous la même chose ; non c’est une union au Christ et, par le Christ, nous sommes unis les uns aux autres. Nous sommes vraiment, pleinement, de la même famille. Il faut que nous donnions en vérité, c’est bien pour cela que saint Paul, dans le passage qui précède celui que nous venons de lire aujourd’hui, insiste sur le fait que, attention ! celui qui communie indignement, communie à sa propre condamnation. Qu’est-ce que c’est que communier indignement ? C’est communier en traitant cela par-dessus la jambe, comme si nous avions une union physique, charnelle, et qu’on n’y faisait pas attention. Cela nous blesse et ça blesse aussi le Corps du Christ et toute la communauté humaine. Quand un homme se donne à son épouse, quand une femme se donne à son époux, il ou elle peut lui dire « ceci est mon corps donné pour toi ». Quand une mère porte un enfant dans son ventre, elle peut dire à son enfant « mon corps donné pour toi ». Lorsque je dis à la messe « Ceci est mon Corps livré pour vous », croyez bien que j’y mets aussi moi. Ma vie vous est donnée et, quand vous entendez cette parole, vous êtes invités, vous aussi, à dire, de tout votre cœur, mon corps, ma vie donnés pour Toi ; et on s’adresse à qui ? À son prochain, celui qui est là, près de moi. Cette Parole de Jésus, c’est mon Corps donné pour la vie du monde.
Oui, nous ne communions pas juste pour faire comme les autres, le dimanche entre 11h et 12h, nous communions pour pouvoir sortir dehors, être pleins du Christ, et L’annoncer. Annoncer qu’il y a une seule chose qui compte, et une seule, c’est aimer ; mais vous le savez, nous sortons d’une crise, nous n’en sommes pas encore sortis et peut-être qu’elle va être pire. Mais, dans toutes les solutions qu’on pourra trouver, qu’elles soient économiques ou sociales, il y en a une, que nous chrétiens, avons le devoir de mettre en avant et de porter, c’est l’Amour : c’est la seule solution, c’est la seule chose qui compte. Alors accueillons le Christ qui se donne à nous par amour, et allons Le porter, Lui, Dieu tout Amour, à notre monde.