3e dimanche de l’Avent : la vengeance du Seigneur !

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Homélie du 15 décembre 2019 par l’abbé Gaël de Breuvand
C’est la retranscription d’une prédication orale, le style reste familier, et les titres sont ajoutés après relecture

I – Soyez dans la Joie, Dieu vient vous venger

« Réjouissez-vous, soyez dans la joie ! Je vous le répète, Soyez dans la joie ! » C’est comme ça que saint Paul s’adresse à nous. Se réjouir, comme la terre et le désert de la soif quand ils savent que l’eau va arriver. Se réjouir, comme le pays aride quand il sait qu’il  va se couvrir des fleurs des champs. « Exultez de joie ! », ce sont les mots d’Isaïe, 650 ans avant J.-C. « Exultez de joie car le Seigneur vient ! Voici votre Dieu, Sa vengeance qui vient. Le Seigneur tient Sa revanche. » Et là, c’est un peu surprenant quand même. La vengeance de Dieu ? La revanche de Dieu ? Est-ce que cela voudrait dire que notre Dieu est un Dieu de puissance qui écraserait tous nos ennemis et les réduirait en poussière ? « Soyez forts, ne craignez pas. Voici votre Dieu, c’est la vengeance qui vient. » Alors évidemment, il nous faut entrer dans la logique, dans l’esprit de la Parole de Dieu donnée dans la Bible. C’est une pédagogie : le Seigneur nous prend là où nous en sommes. Et, de fait, à l’époque d’Isaïe, quand on pense Dieu, on pense d’abord puissance et force, d’autant plus que les dieux païens se caractérisent par leur puissance et leur force. Et du coup, on va employer du vocabulaire qui habituellement relève plutôt des dieux païens. Si Baal ou Astarté est capable de se venger, eh bien notre Dieu est encore plus capable, car c’est le seul Dieu, le vrai Dieu.

Puis, Isaïe nous fait avancer d’un pas, car, la vengeance de Dieu, qu’est-ce que c’est ? La vengeance de Dieu, c’est les aveugles qui voient, les sourds qui entendent, les boiteux qui bondissent comme un cerf, le muet qui crie sa joie. La vengeance de Dieu, c’est quand l’Amour l’emporte sur le mal. Oui, il y a bien une disparition dans cette histoire, c’est le Mal qui disparaît. Oui, la vengeance de Dieu n’est pas tout à fait comme notre vengeance à nous. D’autant plus que, on le sait bien dans notre monde, la distinction entre les justes et les injustes ne se fait pas entre des camps humains. La distinction entre les deux est d’abord et avant tout dans notre cœur. Dans notre cœur, il y a du bon, du juste, et du beau : ça, Dieu veut le garder précieusement… et dans notre cœur il y a de l’injuste, et c’est là que le Seigneur veut faire le tri. Et c’est là que la vengeance de Dieu se déploie : dans mon cœur. Alors, de fait, le vocabulaire employé reste bon. Oui, c’est bien une vengeance : faire le tri entre ce qui est bon et pas bon en moi, c’est un peu douloureux, quand même ! Et ça l’est parce que, moi, j’ai une petite tendance à m’agripper à ce qui n’est pas bon. C’est bizarre, je ne le devrais pas… et tant que je m’agrippe, eh bien ça fait mal : il faut que j’apprenne à lâcher prise, à laisser le Seigneur agir, à le laisser obtenir Sa victoire : celle de l’Amour. Oui, allégresse et joie nous rejoindront, douleur et plainte s’enfuiront, parce que nous aurons laissé le Seigneur vaincre. Vaincre dans nos cœurs ; parce que nous aurons participé à l’Œuvre de Dieu. Parce que nous nous serons mis dans le camp de Dieu. Et le psaume le déploie encore plus : « Le Seigneur fait justice aux opprimés, aux affamés Il donne le pain, le Seigneur délie les enchaînés, Il ouvre les yeux des aveugles, Il redresse les accablés, Il aime les justes ». Et c’est le Seigneur Lui-même qui réalise cela : Il vient pour ça ! Et toute l’histoire biblique, tous les Juifs, en lisant ces passages ont bien compris une chose : que Celui qui allait réaliser cela, ce serait le Messie, Dieu lui-même, qui vient visiter Son peuple.

II – le signe du Messie

Et nous faisons un bond de 600 ans, 650 ans : nous nous retrouvons autour de l’an 30 : Jean le Baptiste – celui qui a baptisé Jésus ! – est en prison. On peut penser que c’est un peu compliqué pour lui. Est-ce qu’il était bien ajusté dans sa mission ? Quand on est en prison, on a le temps de réfléchir, et ça tourne ! Et de fait, lui se sait appelé à une mission particulière, celle de préparer le chemin de Celui qui vient après lui, qui est plus grand que lui, et il l’a désigné : « le voici l’Agneau de Dieu » : il a reconnu Jésus. Mais voici que dans cette prison il fait un peu de déprime, et du coup il doute un peu de lui-même, de sa mission… et peut-être un peu de Jésus. Donc il a besoin d’être conforté, et il envoie ses disciples auprès de Jésus. Est-ce toi, ou est-ce un autre qu’on doit attendre ? Et Jésus ne lui répond pas en disant « Oui, c’est moi ! » ; par contre Il demande aux disciples de Jean de rapporter ce qu’ils ont vu, d’être des témoins : « Annoncez ce que vous avez vu : les aveugles retrouvent la vue, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, les pauvres savent la Bonne Nouvelle », autrement dit, la vengeance de Dieu est en place !

Oui, Jean peut être rassuré : c’est bien lui, ce Jésus, le Messie qu’on attendait. Et d’ailleurs Jésus est bien conscient du combat spirituel de Jean le Baptiste : « Heureux celui pour qui je ne suis pas une occasion de chute, heureux celui qui, à travers les signes que Je donne, me reconnaîtra. » Vous savez, à l’époque de Jésus, il n’y en a pas tant que cela à avoir reconnu en Lui le Messie. Pourquoi ? Parce que Jésus ressemble avant tout à… Jésus, un homme : le fils de Marie et de Joseph, le charpentier ! De fait, beaucoup ont chuté, et plus on Le connaissait bien et plus on a chuté bas. Vous savez, à Nazareth, ils ont même voulu le pousser du haut de l’escarpement. Et, de fait, quand, un peu plus tard on arrive à la tension ultime : oui, ben c’est plus simple de se débarrasser de Jésus, on va le tuer, de toutes façons, qu’est-ce que c’est que Jésus ? Il vient de Galilée, le grand nord tout là-haut. De fait, « Heureux celui pour qui je ne suis pas une occasion de chute », ça, c’est l’œuvre du Christ. Le Christ se dévoile à nous par des signes, et nous, on aimerait bien qu’Il se dévoile à nous par des signes, des Signes quoi ! Des tremblements de terre, et un son et lumière un peu impressionnant, ça, ça nous irait bien. Vous vous rappelez l’annonce faite aux bergers ? Un signe vous est donné ! Un  bébé dans une crèche ! Pas très très frappant, comme signe. Parce que, des bébés dans les mangeoires, on n’en voit pas tous les jours, mais c’est possible, et un petit bébé, c’est une merveille mais ce n’est pas très rare.

Et de fait, aujourd’hui encore, nous sommes invités à entrer dans cette reconnaissance des signes de Dieu. Dieu qui agit dans mon cœur, qui me donne une paix. Allez témoigner de la paix que Dieu vos donne. Pourquoi vous êtes chrétien ? Ah ben, parce que moi je me sens bien quand je suis chrétien. Bon, mais ça ne va pas toucher beaucoup de monde, peut-être ? Et pourtant il faut quand même témoigner, et faire comme ces disciples de Jean : annoncer ce qu’on entend et ce qu’on voit. Qu’est-ce qu’on entend ? On entend la Parole du Christ qui nous dit « Ceci est Mon corps », Il parle d’un petit morceau de pain, qui n’est plus du pain et devient le Corps du Christ. « Ceci est mon sang » et ce petit peu de vin, ce n’est plus du vin, c’est le Sang du christ. Allons témoigner de cela. Ça, c’est le signe qu’Il nous donne. Tout petit signe, humble, pauvre, à l’image de… de Dieu, finalement. Et il nous faut tenir en même temps, et c’est cela qui est difficile, il nous faut tenir en même temps la splendeur et la gloire de Dieu, Celui qui est le Transcendant, le Tout Autre, celui sans qui rien n’existe, et en même temps, Dieu de tendresse et d’humilité, ce petit être qui est tout proche de moi.

III – Simplicité divine

Alors, accueillons cette Bonne Nouvelle du Seigneur. Oui, réjouissons-nous car Il vient. Et, du coup, quand nous avons bien perçu que le Seigneur nous aime, nous ne pouvons être que rassurés. Le Seigneur nous aime, et donc tout ce qui se passe dans nos vies, heureux, joyeux, douloureux, parfois triste, tout cela, Dieu veut en faire du bien pour la Vraie Joie. C’est bien pour cela que Jésus termine en disant « personne ne s’est levé de plus grand que Jean le Baptiste, et pourtant le plus petit dans le royaume des Cieux est plus grand que lui. » Ça, c’est l’avant et l’après Jésus. Jean-Baptiste c’est un homme d’avant Jésus, donc la plénitude du royaume de Dieu ne lui est pas encore donnée. Dieu n’est pas encore pleinement installé dans son cœur comme il le sera dans nos cœurs de baptisés. Et à ce moment-là, nous sommes, dès aujourd’hui – parce que le Seigneur Jésus habite en nous – plus grands que Jean Baptiste. Alors depuis, Jean-Baptiste est mort, et il est au ciel, Dieu est en lui ; donc il a repris de l’avance ! Mais, voilà : l’important c’est de reconnaître le signe qui nous est donné, tout petit signe, et de l’accueillir. Ah un tout petit dernier exemple, vous vous souvenez de Naaman le Syrien, c’est celui qui était lépreux. Il va voir le prophète Elysée, parce qu’on lui a dit qu’il y avait un grand prophète qui guérissait les lépreux, alors il y va. Et Elysée lui dit : si tu veux être guéri, va te  baigner 7 fois dans la rivière, le Jourdain. Et Namaan part, furieux ! Ahh un truc aussi simple !! D’ailleurs, je me serais baigné chez moi, mes fleuves sont quand même beaucoup plus importants, ils auraient été à la taille de Dieu. Mais le serviteur de Naaman lui dit : « mais on t’aurait demandé de faire une chose compliquée, tu l’aurais faite, pourquoi ne fais-tu pas une chose simple ? » Reconnaître Le seigneur dans les signes qu’Il nous donne, même s’ils sont tout simples ; au contraire : surtout s’ils sont tout simples ; et nous mettre au pas de Dieu, au rythme de Dieu.

Réjouissons-nous, le Seigneur vient ! Il vient avec puissance, Il vient avec accomplir sa vengeance, Il vient faire de nous des témoins de Son amour.